Non remboursable, la TVA pénalise les SCD dans l’achat de ressources électroniques. État des lieux et outil pour « baisser la note ».
La doctrine administrative considère que la mise en ligne de ressources électroniques – périodiques, livres, bases de données, images, musique, etc. –, s’analyse comme une prestation de services. Plus précisément, cette fourniture de services entre dans la catégorie des prestations immatérielles et dans la sous-catégorie des services fournis par voie électronique (1). Or il se trouve que les prestations immatérielles sont taxées au taux de 19,6 %. Plus grave : la TVA sur les prestations immatérielles ayant trait à la documentation est très généralement non déductible quand elle est versée par des établissements publics. En effet, l’acquisition de ressources documentaires électroniques entre dans le cadre des prestations à des fins de recherche ou d’enseignement, lesquelles appartiennent au secteur exonéré. La règle du parallélisme en matière fiscale énonce que la TVA est déductible quand elle s’applique à des opérations taxables, et inversement, que la TVA est non déductible quand elle s’applique à des opérations exonérées. Il n’est donc pas possible aux établissements acquéreurs de déduire la TVA sur le montant des ressources électroniques acquises. Comme le note le rapport Isaac, le taux de TVA actuel appliqué aux ressources électroniques « pénalise très fortement les budgets des services communs de la documentation ». Le même constat peut être élargi au niveau européen. Une étude du groupe de Francfort de 2006, étude menée par le Sofi (Institut de recherche sociologique de Göttingen) montre que la TVA freine considérablement le développement de la documentation électronique en Europe. Le poids de la TVA pèse sur la décision des bibliothèques européennes de choisir la version électronique pour leurs ressources. Les budgets sont réduits à proportion de l’élévation du taux de TVA. Comparativement, d’autres pays, comme les États-Unis, qui bénéficient d’une fiscalité nulle sur les publications électroniques, bénéficient d’un avantage compétitif. Pour le groupe de Francfort, l’abaissement du taux de TVA sur les publications électroniques pourrait être un facteur déterminant de l’accroissement de la compétitivité européenne. Le rapport du Sofi précise toutefois que le paysage de la documentation électronique en Europe n’est pas totalement uniforme. Le groupe de Francfort mentionne le cas des bibliothèques du Danemark, qui bénéficient d’une exemption totale. Quant aux bibliothèques suédoises, elles bénéficient d’un remboursement de la TVA sur les ressources électroniques. Au Royaume-Uni, a été mis en place un dispositif complexe de rattrapage partiel des sommes versées au titre de la TVA.
pour baisser la note
Il existe en droit fiscal français un outil de ce type, outil généralement méconnu, qui permet d’atténuer légèrement les effets négatifs de la taxation des ressources électroniques. On y recourt dans le cas spécifique où l’utilisation de ces ressources de niveau recherche acquises permet non seulement aux enseignants-chercheurs concernés de remplir des missions de recherche ou d’enseignement – secteur exonéré –, mais aussi aux laboratoires de l’établissement public de répondre à des objectifs fixés dans le cadre de contrats avec des entreprises privées – secteur taxable. Ces dépenses sur le budget d’acquisitions de ressources électroniques de niveau recherche entrent dans la catégorie des dépenses mixtes. Dans ce cas de figure, le service de documentation de l’établissement public concerné est en droit appliquer aux montants de TVA versés au titre de l’acquisition de ressources électroniques de niveau recherche, un coefficient de déductibilité fixé conventionnellement par le service fiscal de l’établissement. Voilà un outil fiscal de rattrapage certes insuffisant mais qui a le mérite d’exister.
(1) Art. 98 C de l’annexe III au code général des impôts.
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