Ce n'est pas une attaque en règle contre la Direction interministérielle du numérique mais ça y ressemble. Dans ses "observations définitives" consacrées au pilotage de la transformation numérique de l'Etat, la Cour des comptes n'y va pas par quatre chemins. A ses yeux, "la capacité de la Dinum à piloter une politique interministérielle a été altérée par des changements de direction fréquents depuis 2018 et des orientations stratégiques variées."
Les observations de la Cour des comptes ne portent pas sur la qualité de la dématérialisation des démarches publiques mais bien sur l'encadrement de la Dinum au regard des moyens qui lui sont octroyés. Son budget a en effet été multiplié par cinq entre 2019 et 2022 selon les magistrats de la cour : "cette croissance budgétaire a engendré une gestion complexe des financements qui a compliqué l'affectation et la gestion des moyens. La gestion des ressources humaines de la Dinum est également complexe, avec une augmentation continue des effectifs mais des vagues de départs liées à des désaccords stratégiques."
La juridiction financière préconise une gouvernance renforcée, notamment par un comité interministériel annuel présidé par le Premier ministre.
Une grande instabilité des effectifs
Problème récurrent de l'Etat, le recrutement de personnel qualifié est entravé par la concurrence du secteur privé, lui aussi en quête de spécialistes du numérique. Résultat : la Dinum est confrontée à "une grande instabilité des effectifs et de conditions de recrutement difficiles dans un secteur très concurrentiel." En hausse continue, ses effectifs ont augmenté de 43 % entre 2020 et 2023 et devraient continuer de croître en 2024. Un mouvement qui n'empêche pas la Cour des comptes de constater "des vagues de départs consécutifs à des désaccords stratégiques".
Rattachée administrativement depuis 2019 au Secrétariat général du gouvernement, la Dinum est responsable de la mise en œuvre de la stratégie numérique de l’État. Elle conseille le Premier ministre et les ministres compétents sur la prise en compte du numérique dans les politiques publiques et pilote la transformation numérique de l’État à travers plusieurs missions.
Ce n'est pas la première fois que la Cour des comptes s'exprime sur la transformation numérique de l'Etat. En 2020, l'institution préconisait l'arrêt des projets dont la durée de réalisation dépasse cinq ans et proposait le recrutement de 400 professionnels dans la filière numérique d'Etat.