Il faut repenser son activité sous l’angle des données. Qui n’a pas entendu cette antienne ? La question est d’abord de savoir comment collecter ses données. Voici une méthode issue de l’ouvrage « Big data, smart data, stupid data » d’Antoine Denoix.
La collecte pour tous ! En voilà une bonne question ! Comment s’assurer que nous collectons bien toutes les data utiles à notre activité ?
Tous les jours, vos collaborateurs effectuent des activités dans l’entreprise. Mais posez-vous la question : quelle part de leur travail produit de la data ? De l’information ? À y réfléchir, probablement très peu. Trop peu. Pourtant, vos collaborateurs produisent beaucoup de data, tirées de ce qu’ils font. Mais ces data restent informelles, captées, puis trop vite oubliées, par la mémoire de chacun. Le sourire d’un client ; la répétition d’un bug sur un système informatique ; le résultat d’un A/B testing sur un site web… L’enjeu ? Formaliser ! Nous aurions pu rajouter : lorsque c’est utile.
Or, il est difficile pour un collaborateur, ou même une équipe, de juger de ce qui est utile au collectif. Même pour des secteurs a priori peu centrés sur le client final, le digital va quand même vous rapprocher de vos clients. Et plus la relation avec eux va devenir interactive, chaude… plus votre capacité à personnaliser leur expérience va faire la différence.
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Or, pour personnaliser, il faut connaître, anticiper, s’ajuster… donc avoir collecté beaucoup de data ! Nous partageons, ici, une cible idéale. Le nerf de la guerre, en matière de collecte data, ce sont vos outils. S’ils rendent la collecte naturelle à vos collaborateurs, en l’intégrant dans leurs gestes-outil, c’est déjà gagné !
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Une illustration de collecte, concernant les plateformes téléphoniques, si vous en utilisez. N’attendez plus, enregistrez l’ensemble des discussions. Ayez recours à des outils d’enregistrement, permettant d’opérer du speech to text, à savoir une retranscription automatique des discussions orales en textes. Les usages business sont innombrables, notamment pour améliorer la satisfaction client, en détectant mieux les irritants exprimés. Et n’oubliez pas que demain, ou après-demain, vous aurez très probablement à développer des bots, à savoir des robots capables d’interagir, via un chat ou sur les réseaux sociaux, avec des clients de façon automatisée, en usant un langage naturel.
Ces bots doivent apprendre à comprendre les mots de vos clients pour répondre à leurs sollicitations. Il faut les éduquer. L’aliment qui va permettre d’entraîner le robot, ce sont justement toutes les discussions réelles, enregistrées, menées par vos gestionnaires en plateformes. D’un coup, ce qui apparaissait inutile et fastidieux (collecter systématiquement l’ensemble de vos discussions téléphoniques) devient l’une des clés de votre compétitivité, dans un contexte de rapide automatisation du marché.
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En interne, présentez, expliquez et mettez en avant le concept-socle de collecte « pour tous ». Une exigence d’autant plus critique, si vous entretenez plusieurs canaux d’interaction avec vos clients : distribution physique, écrans digitaux et plateforme téléphonique. Dans un contexte omnicanal, voici l’ambition collective que vous pourriez, par exemple, vous fixer (la formulation est un peu administrative, mais toutes les notions importantes y sont présentes).
Chaque point de contact avec nos clients, par nous ou par les partenaires de notre entreprise, donne lieu à une collecte cohérente, fluide, et de qualité, de toutes les data susceptibles d’enrichir la connaissance que nous avons d’eux… data structurées qui, diffusées dans nos systèmes et partagées avec pertinence entre les acteurs de la relation client, permettront, dans le respect de la réglementation, d’enrichir notre proposition de valeur, depuis l’acquisition jusqu’à la fidélisation de nos clients.
Attention ! Devenir une entreprise « apprenante » n’est pas simple ! Pour être à la hauteur, mettez vos collaborateurs en capacité de collecter les data. Pour ce faire, voici deux conditions minimales à réunir.
Mettre en place des outils
Les outils doivent vous permettre de récolter deux types de data. D’abord, les data indispensables à votre activité et à la réglementation (pensez à l’exigence de connaissance du client). Mais aussi, les data « de côté », qui ne vous sont pas immédiatement indispensables et utiles, mais qui pourraient l’être demain. Vous appuyer sur un outil de CRM (Customer relationship management, interface qui rassemble les data clients) unique vous facilitera grandement la tâche. Sur son poste de travail en plateforme téléphonique, sur son iPad lors d’une vente en porte-à-porte… chacun de vos collaborateurs doit, a minima, pouvoir signifier, dans un champ de formulaire vide, par quelques phrases ou quelques mots, les informations les plus intéressantes.
Quelle part de nos collaborateurs peut, dans l’exercice de son métier, remonter une data intéressante, quelle que soit sa nature ? Plus vos formulaires de collecte seront sophistiqués, plus les data, une fois dans vos systèmes informatiques, seront facilement utilisables. Pensons à une série de questions simples, intuitives auxquelles vos collaborateurs pourraient rapidement répondre : client satisfait ? Oui ou non ? Déménagement en vue ? Oui ou non ? Suspicion de fraude ? Oui ou non ?
Le Graal ? Que cette collecte ne nécessite pas un effort supplémentaire dans l’équipe, mais fasse partie intégrante du geste-outil lié à son activité. La parfaite illustration est la vente de produits d’épargne. Votre conseiller doit connaître son client, de façon à lui apporter de justes et honnêtes conseils. À cette fin, lors de l’entretien, il récolte de nombreuses data, via un module de type « know your customer » (connaître son client) : salaires, situation du conjoint, patrimoine immobilier… Un exercice de collecte utile pour l’entreprise, et accepté comme tel par le client. C’est une configuration idéale.
Motiver vos équipes
Collecter davantage vous prendra du temps. Et le temps… c’est de l’argent ! Motivez vos collaborateurs en évoquant l’ambition collective, votre stratégie d’entreprise. Bien qu’indispensable, ce n’est probablement pas suffisant.
Chaque année, pour garder des niveaux élevés de collecte de data (en quantité comme en qualité), appuyez votre programme sur une rémunération spécifique, et ajustez le partage de la valeur. Sans trop caricaturer, vous avez deux populations bien différentes à convaincre : l’interne et l’externe.
- Pour la première, celle de vos collaborateurs, la rémunération reste un levier facile à activer, et à effet plutôt immédiat. Par exemple : sur vos plateformes téléphoniques, collecter plus de data prendra tant de secondes supplémentaires à chaque appel. Ajustez donc les objectifs de productivité en conséquence ! Généralement, vos collaborateurs internes n’ont rien contre le principe de mieux collecter et partager les data. Ils demandent simplement (et à juste titre) que leurs objectifs et rémunérations évoluent en cohérence.
- Pour la seconde population, l’externe, la partie est moins facile. Il s’agit de vos partenaires, de vos prestataires, ou encore de vos distributeurs. Ils peuvent s’inquiéter de perdre la relation client s’ils partagent ainsi les data avec vous. D’où, parfois, la multiplication de comportements déviants : des numéros de téléphone clients qui restent sur des annuaires personnels, le recours à des messageries e-mail « à part »… Dans ces cas-là, le levier de la rémunération immédiate, au temps passé, ne suffit pas. Il vous faudra repenser la question, plus globale, du partage de la valeur.
En voilà une bonne question ! Comment intéresser économiquement mon écosystème externe à la valeur globale d’un client ?
Pour libérer les énergies de chacun, ne prenez pas le sujet par le petit bout de la lorgnette !
Vous avez besoin, avant de vous lancer, d’avoir une idée plus précise du potentiel de collecte ? Demandez à vos équipes de faire preuve d’imagination. Et de lister toutes les data qu’elles pourraient collecter, si c’était leur travail à temps plein. Puis, de les catégoriser ainsi : collectées et utiles ; collectées et inutiles ; non collectées et utiles ; non collectées, mais inutiles… vous verrez des éléments intéressants, et ce dans les quatre catégories (même la dernière !).
La cartographie des data disponibles, en interne comme en externe, laissera transparaître, à coup sûr, beaucoup de zones grises, à savoir des gisements de data précieux, sur lesquels la question de la propriété ou de l’accessibilité se pose. Cet exercice est justement l’opportunité de trancher. Parle-t‑on de data critiques pour mon entreprise ? Ou d’importance plus marginale ? En fonction des réponses apportées, déclenchez un mouvement de réinternalisation de certaines data. Prenons un exemple tiré de l’univers marketing. Si vous investissez fortement en publicité, vous êtes sûrement accompagné par une agence d’achat média. Or, la publicité, notamment digitale, génère beaucoup de data : impressions de bannières, clics, visites, temps de diffusion… des gisements essentiels dans la compréhension du cycle d’achat et le profilage de vos clients et prospects. Eh bien, posez-vous deux questions : où sont ces data ? Pouvons-nous y avoir facilement accès, au niveau le plus fin que nous souhaitons ? Ces data sont collectées par les outils digitaux d’achat média, et parions que vous devrez passer, vous ou vos équipes, par votre agence pour y accéder…, avec le risque de friction qui en découle. Si c’est le cas, un conseil : réinternalisez toutes les data publicitaires, en contractualisant directement avec les éditeurs d’outils digitaux.
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Antoine Denoix