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La signature électronique en 2019 : marché, cadre légal et usages

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    "Il y aura en Europe un certain nombre d’acteurs qui auront une taille assez importante et qui collaboreront entre eux sur le marché", prévoit Julien Stern, fondateur et président d’Universign. (DR)
  • La signature électronique est l’une des clés essentielles des projets de dématérialisation de l’efficacité des organisations digitales. Depuis ses débuts, les prestataires qui la fournissent se livrent une rude concurrence dans un marché loin d’être stabilisé et qui suscite l’appétit des investisseurs. Sa réglementation semble plus stable. Quant à sa mise en pratique, elle ne fait pas encore preuve de la maturité voulue, comme le rappelle l’expert Pierre Fuzeau, DG de Serda. Deux retours d’expérience, ceux de la société foncière Genica et de Younited Credit, spécialisée dans le crédit à la consommation, montrent les usages et les mises en pratique.

    Sommaire du dossier :

    Au mois de juillet 2016, Archimag consacrait un dossier à la signature électronique et dressait un constat : le marché est en plein bouillonnement. Trois ans plus tard, cette tendance s’est encore renforcée et nous sommes désormais passés au stade de l’ébullition. Règlement eIDas en Europe, loi eSign Act aux États-Unis, levées de fonds, rachats et partenariats, le secteur de la signature électronique n’en finit pas de se renouveler.

    À commencer par Yousign qui a récemment noué un partenariat avec eFounders afin de devenir « un leader européen » sur ce « marché colossal et très concurrentiel ». Chacune des deux entreprises apportera ses propres compétences : l’infrastructure technique et la base clients pour Yousign, et l’expertise marketing à l’international pour eFounders. Yousign n’en est pas à son coup d’essai. L’éditeur français, né en 2013, a déjà procédé à une première levée de fonds de 500 000 euros en 2016, puis une deuxième de trois millions d’euros en 2018.

    > Lire aussi : Comment mettre en place et gérer un système d'archivage électronique

    Pour Antoine Louiset, cofondateur et PDG de Yousign, cette effervescence s’explique aisément :

    « Le marché de la signature électronique est estimé à environ 1,1 milliard d’euros à l’échelle mondiale et sa croissance est d’environ 30 % par an ! Avec de telles perspectives, il est naturel que les financiers et les investisseurs s’intéressent à la signature électronique ».

    Après plusieurs levées de fonds et partenariats, l’éditeur basé à Caen va pousser ses pions au-delà des frontières françaises avec le prochain déploiement de ses solutions dans différents pays européens à commencer par l’Allemagne et le Royaume-Uni. Sur son site, Yousign est d’ailleurs en pleine campagne de recrutement dans différentes familles d’emploi : commercial, technologique et juridique.

    « À ce jour, nos 1 500 clients se trouvent essentiellement en France, mais nous avons l’ambition de devenir un acteur européen de premier plan. Nous vivons un moment particulièrement intéressant : nous sommes au début d’une adoption massive de la signature électronique. Après le marché historique qui s’est formé autour de la banque-assurance-finance, de nouveaux secteurs d’activité sont en cours d’adoption, à commencer par l’immobilier. Nous allons répondre à cette demande ! »

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    Pas d’acteur dominant en Europe

    Autre éditeur français à faire ses emplettes auprès des investisseurs, Universign a levé 12 millions d’euros en 2018 après un tour de table réunissant Odyssée Venture, la Caisse des Dépôts et CM-CIC Innovation. Cet apport d’argent frais permettra à l’éditeur français d’accroître ses positions sur le marché européen notamment au Benelux, en Espagne, en Italie et en Allemagne. Une partie de cette levée de fonds est consacrée à un vaste plan de recrutement portant sur une centaine d’emplois.

    Avec plus de 3 000 clients dont un certain nombre appartenant au Cac 40, l’éditeur voit désormais les choses en grand. Selon son fondateur et président Julien Stern, qui s'exprimait en avril 2019 sur la chaîne BFM Business, le marché européen devrait prendre la forme d’une cohabitation entre éditeurs : 

    « Notre secteur se porte extrêmement bien car porté par une très forte croissance. Le plus probable, c’est qu’il n’y aura pas en Europe d’acteur trop dominant dans la mesure où notre activité est très liée à la réglementation. Elle est également très liée à l’identité numérique qui est quelque chose de régalien. On peut donc anticiper qu’il y aura en Europe un certain nombre d’acteurs qui auront une taille assez importante et qui collaboreront entre eux sur le marché ».

    Le mouvement qui agite le marché de la signature électronique ne date pas d’aujourd’hui. Dès 2015, l’acteur historique (made in USA) DocuSign procédait au rachat de l’activité signature électronique du groupe français OpenTrust. Une façon pour le mastodonte états-unien de poser un pied sur le continent européen comme le reconnaissait alors Keith Krach, le PDG de DocuSign : « En tant que leader du marché en France, OpenTrust nous apporte des équipes de très haut niveau, une forte orientation client, une technologie de classe mondiale approuvée par les autorités européennes et une profonde expertise du marché ».

    La signature électronique appliquée aux RH

    Jean-Christophe Bernard, responsable commercial de Primobox, constate « une véritable accélération avec une forte prépondérance de projets de signatures électroniques dans l’écosystème RH ». Mais il signale un point juridique : « Le règlement eIDas contribue à rassurer les utilisateurs et à lancer davantage de réflexions. Attention cependant : le règlement définit un cadre technique harmonisé au niveau européen, qu’il convient de mettre en perspective avec le cadre juridique national applicable par ailleurs ».

    À ses yeux, « les évolutions porteront davantage sur l’usage, en allant au-delà du simple acte de signature. Les entreprises recherchent désormais des solutions capables de gérer le cycle de vie du document signé, en partant de sa constitution, en passant par sa signature jusqu’à son usage et son stockage, le tout avec la capacité de s’intégrer aux outils existants ».

    Pour la sphère publique, tout reste à faire

    Si le secteur privé est en passe d’adopter la signature électronique, il n’en va pas de même au sein de l’administration. Pour Charles du Boullay, PDG de CDC Arkhinéo, « les usages ont démarré dans la sphère privée avec contractualisation en ligne et le potentiel reste très important. Mais pour la sphère publique, tout reste à faire ».

    La filiale de la Caisse des Dépôts reste positionnée comme « offreur de service » d’archivage pour les prestations de service de confiance dans le domaine de la signature électronique. 

    « CDC Arkhinéo est “prestataire de service de confiance qualifié” (PSCQ) pour la validation et la préservation des signatures électroniques (et des cachets) qualifiées dans le cadre du règlement européen eIDas », explique son PDG.

    Aujourd’hui, la société fournit plusieurs services de confiance qualifiés comme la validation des signatures électroniques qualifiées (SEQ), qui garantit la sécurité juridique d’une SEQ en fournissant la preuve d’une validation par un tiers qualifié (CDC Arkhinéo) :

    « Pour chaque archive signée qui sera consultée, on aura la certitude, au-delà de la durée de vie du certificat limitée à deux ou trois ans, que la signature était valide au moment où elle a été utilisée ».

    Autre service, la préservation des signatures électroniques qualifiées qui permet d’étendre la fiabilité et la pérennité de celles-ci au-delà de leur période de validité technologique. 

    « Pour chaque SEQ archivée, CDC Arkhinéo s’engage sur son intégrité, sa conservation et sa recevabilité juridique à long terme », précise Charles du Boullay ; « ce service permettant de se prémunir contre l’obsolescence technologique ou la compromission des algorithmes utilisés pour la signature ».

    Devant le potentiel de développement de la signature électronique, « CDC Arkhinéo va continuer d’innover comme elle l’a fait cette année avec la qualification eIDas ».

    Derrière la signature électronique, la blockchain

    Depuis quelques mois, un autre élément est en passe de faire évoluer le secteur de la signature électronique : la blockchain. Les observateurs s’accordent sur une promesse : la blockchain va notamment apporter de la valeur sur la traçabilité des transactions.

    Selon Benjamin Faraggi, dirigeant de la société Spuro, la blockchain offre d’autres atouts : « La signature électronique par la blockchain est la méthode la plus simple et la moins chère pour accomplir cette mission. La plus simple car il n’est pas nécessaire de récupérer les clés publiques de vos correspondants pour vérifier la signature. La moins chère parce qu’il suffit d’une seule installation car celle-ci est à vie en quelque sorte alors qu’un certificat standard doit être renouvelé tous les ans ou tous les deux ans. La blockchain est un nouveau modèle économique qui change l’usage de la signature électronique ».

    L’éditeur Keeex s’est également positionné sur ce segment et commercialise une solution qui calcule les « hash cryptographiques » des fichiers et les stocke dans la blockchain : « Une fonction de hachage cryptographique associe à une donnée de taille arbitraire une signature de longueur fixe. Sa propriété essentielle est qu’elle est impossible à inverser », explique l’éditeur ; « cela signifie que le calcul de la donnée d’entrée à partir de sa signature se révèle impossible sur le plan pratique ». Cette solution a déjà été adoptée par plusieurs entreprises : Orange, SNCF Réseau…

    L’an dernier, c’est le géant DocuSign qui annonçait l’intégration de ses services dans la blockchain Ethereum.

    De toute évidence, le marché de la signature électronique n’a pas encore atteint son point d’incandescence. Porté par les réglementations, dopé par les technologies, apprécié des usagers, il offre un terrain de jeu prometteur pour les investisseurs. Après avoir passé le cap du milliard d’euros en 2018, les éditeurs s’attendent à de nouveaux records dans les mois à venir.


    + repères

    Quand la signature électronique s’invite au tribunal d’instance…

    Le 18 septembre 2018, le tribunal d’instance de Nîmes a tranché un litige opposant une cliente à un établissement de crédit. Depuis plusieurs mois, cette cliente avait décidé de ne plus régler les échéances qu’elle avait contractées envers cet établissement.

    Ce dernier a alors produit devant le tribunal une synthèse du fichier de preuve émanant du fournisseur de la signature électronique. Celui-ci « en sa qualité de prestataire de service de certification électronique, y atteste de la signature électronique le 13/04/2016 à 15:15:49 du contrat de crédit par Madame X », explique le tribunal ; « ces éléments permettent d’authentifier la signature électronique du contrat par Madame X ».

    Le tribunal d’instance de Nîmes a condamné la cliente à payer à l’établissement de crédit la somme de 12 825,09 euros à titre principal avec intérêts. Il l’a également condamnée à payer la somme de 150 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

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    Êtes-vous prêts à renoncer à des services numériques ou à vos appareils électroniques pour le bien commun ? Face à l'urgence climatique, notre rapport au progrès et à la technologie est souvent remis en question. Archimag Podcast a rencontré Alexandre Monnin, philosophe, directeur du master Sciences, Stratégie et Design pour l’Anthropocène à l’ESC Clermont Business School et auteur de l'ouvrage "Politiser le renoncement", aux Éditions Divergences. Il est aussi co-initiateur du courant de la redirection écologique, dont il nous explique le principe.
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