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Qu'est-ce qu'un PSBC ?
PSBC. Ces quatre lettres sont inconnues du grand public, mais elles sont de plus en plus familières parmi les archivistes et, plus largement, au sein des professionnels de la culture.
Le PSBC, ou Plan de sauvegarde des biens culturels, permet à un établissement conservant des biens culturels, d’anticiper un sinistre et d’assurer la sauvegarde de ces biens lorsqu’un accident survient. Lors du tragique incendie de la cathédrale Notre-Dame en 2019, ce plan avait permis de préserver l’essentiel du patrimoine alors que le feu ravageait l’édifice.
Deux objectifs principaux sont assignés au PSBC :
- Permettre un repérage immédiat des biens identifiés comme prioritaires devant être évacués ou protégés sur place en cas de sinistre ;
- Indiquer les moyens matériels nécessaires à la prise en charge des biens, tout en assurant leur bonne traçabilité et leur bonne gestion à l’issue de cette prise en charge.
Dans un aide-mémoire publié en 2014 par le Service interministériel des archives (Siaf), il est rappelé que le Plan de sauvegarde fait partie intégrante du célèbre plan Orsec (Plan d’organisation des secours) dirigé par les préfets : il constitue « une approche systémique, qui analyse toutes les phases avant, pendant, après un sinistre ».
Un maître-mot suffit à définir la philosophie générale du PSBC : l’anticipation.
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Un travail d’équipe transversal pour sauver les archives
Un plan de sauvegarde présente plusieurs caractéristiques : c’est un travail d’équipe, il est transversal et il s’appuie sur un réseau qui requiert diverses compétences. Il est mené sous l’autorité d’un comité de pilotage qui assure la conduite et le suivi du projet.
Celui-ci est composé de plusieurs membres :
- La direction du service ;
- Le chef de projet ;
- Le responsable du bâtiment et du traitement d’air ;
- Le chef du projet SDIS (service départemental d’incendie et de secours) ;
- Le représentant des AD s’il s’agit d’archives municipales ;
- Éventuellement le représentant du maire ou du conseil départemental, de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles), de la préfecture, de la police ou de la gendarmerie.
Des groupes de travail sont également constitués et leur nombre dépend de la dimension du service d’archives. À titre indicatif, ces groupes peuvent revêtir les formes suivantes : coordination des équipes, évaluation des risques, formation, bâtiment et traitement de l’air, choix des collections à sauver en priorité… Ce dernier point, qui consiste à prioriser les collections et à mettre en place une signalétique adaptée, est logiquement assuré par les conservateurs.
Rappel important : les SDIS, qui organisent l’activité des sapeurs-pompiers, ont pour priorité de sauver les vies humaines. « La sauvegarde du patrimoine sera secondaire », précise le Siaf ; « en cas de risques sur la structure du bâtiment, seuls les pompiers auront accès, c’est eux qui iront chercher les collections à sauver en priorité, elles seront ensuite prises en charge par le personnel du service. Chacun portera un brassard de manière à être facilement identifiable et à éviter que ne s’introduisent des intrus (presse, badauds) ».
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Des exercices grandeur nature
Sans surprise, un plan de sauvegarde est inimaginable sans formation préalable. Il s’agit de sensibiliser les archivistes, bien sûr, mais aussi les intervenants extérieurs comme les pompiers. Ceux-ci seront en effet les seuls à évacuer les collections en cas de sinistre majeur alors qu’ils ne sont pas préparés à manipuler des archives.
« La formation doit donc les inclure, ils seront d’une grande utilité pour définir les risques et préconiser des actions de mitigation », explique le Service interministériel des archives de France ; « des exercices grandeur nature, conçus sans avertir le personnel, permettront de vérifier les compétences acquises lors d’un incendie (simulation de fumée) ou d’une inondation et d’éviter ultérieurement le stress majoré en cas de manque de préparation. Pour ce faire, il faut collecter des documents et photographies représentatifs de la diversité des collections (matériaux et formats) qui seront sacrifiés pour l’occasion. »
La formation doit déboucher sur une agilité qu’il conviendra de reproduire en cas d’accident : exercices d’évacuation (personnes et collections), maniement d’extincteurs, gestion du stress… Elle peut également passer par un « jeu sérieux » (serious game) destiné à acquérir les automatismes et les réflexes face à un sinistre (voir encadré).
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Après le sinistre
Le retour à la normale ne s’improvise pas. Les archives ne pourront être réintégrées dans les magasins que lorsque ceux-ci auront été remis en l’état. Après une inondation, par exemple, l’équipement (murs, sols, fenêtres, plinthes, portes, mobilier…) devra être sec afin de ne pas favoriser la prolifération de moisissures.
De même, la vérification de la qualité de l’air et des surfaces devra être assurée par des spécialistes.
En 2016, les archives départementales de Vendée ont été victimes d’un dégât des eaux. L’eau s’est répandue dans la salle de lecture avant d’investir un magasin d’archives où était conservée une partie du cadastre du département. Le retour d’expérience qui en a été tiré peut servir d’exemple :
« La mobilisation du personnel, sa réactivité et la mise en place rapide du séchage des archives ont permis de limiter les dommages. Au final, ce sinistre aura été riche en enseignements pour les archivistes qui veillent à conserver, dans les meilleures conditions possibles, les collections ».
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Un document pour tous les intervenants du plan de sauvegarde
Le respect de ces procédures peut être consigné dans un document synthétique. Celui-ci doit comporter les éléments suivants (liste non exhaustive) :
- La liste des intervenants avec leurs coordonnées et leur rôle ;
- Le plan d’accès au site ;
- Les modalités d’accès (localisation des clés, alarmes…) ;
- L’indication des biens à évacuer en priorité (par un code couleur par exemple) ;
- L’aire de stockage provisoire.
Bien entendu, lorsqu’un incendie se déclare ou qu’une inondation survient, le stress et la panique ont tendance à stupéfier n’importe quel individu. Pour cette raison, il est vivement conseillé de rédiger un document concis et parfaitement lisible à destination de tous les intervenants impliqués dans le plan de sauvegarde. Et de le tenir à jour.
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Comment préparer un PSBC « en s’amusant » ?
Le Service interministériel des Archives de France (Siaf) a conçu deux jeux sérieux (serious games) destinés à acquérir les automatismes et les réflexes face à un sinistre. Scénario : « Un magasin d’archives a pris feu. Après le passage des pompiers, il faut évacuer, trier et traiter les documents inondés par les canons à eau. Vous êtes nommé coordinateur PSBC, à vous de prendre les décisions qui permettront un sauvetage efficace des archives et d’adopter l’attitude qui recueillera l’adhésion de vos équipes ! »
Le premier de ces jeux est plus particulièrement consacré à la préparation des opérations de sauvetage avec la constitution des équipes d’intervention et de la répartition des rôles et des responsabilités. Le second s’attache au sauvetage à proprement parler des archives (évacuation et tri des documents, importance de la communication entre les équipes d’intervention, traçabilité des collections).
Chacun de ces jeux est accompagné d’une vidéo. En s’adressant ainsi aux archivistes, le Siaf mise sur la complémentarité des deux dispositifs : « Mettre en pratique les connaissances que vous aurez acquises suite à la visualisation des films, et (…) apprendre en vous amusant ! »