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HI!Paris, l'IA en mode intersciplinaire

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    Hi!Paris a fait le choix de recourir au secteur privé et au mécénat et dispose d'un budget annuel de 50 millions d’euros. (Hi!Paris)
  • Lancé en 2020, le centre Hi!Paris entend devenir un pôle de référence à l’échelle mondiale dans les domaines de l’intelligence artificielle et de la science des données. Sous les auspices de l’Institut Polytechnique de Paris et de HEC Paris, il place l’interdisciplinarité au cœur de sa stratégie. Et son financement, qui fait appel aux mécènes privés, rompt avec les pratiques qui avaient cours jusqu’ici.

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    En 2018, Cédric Villani remettait un célèbre rapport intitulé « Donner un sens à l’intelligence artificielle ». Deux ans plus tard, le centre interdisciplinaire Hi!Paris voyait le jour à l’initiative de deux établissements prestigieux : HEC Paris et l’Institut Polytechnique de Paris.

    Son objectif : créer un leader mondial dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA) et de la science des données. À l’heure où la concurrence semble se jouer entre la Chine et les États-Unis, cette structure dédiée à l’IA et à la science des données a pour ambition de faire émerger une voie alternative : « c’est un enjeu essentiel pour développer les technologies liées à l’IA en France, notamment face aux institutions anglo-saxonnes et asiatiques ».

    Situé à Palaiseau (Essonne), là où le taux de matière grise est probablement le plus élevé de France, Hi! Paris s’est donné pour ambition de couvrir un très large spectre disciplinaire (apprentissage machine, statistiques, cybersécurité, IA appliquée à la finance, etc.), mais aussi de réflexion sur l’impact sociétal de l’IA dans les domaines de l’éthique, de la santé et du climat.

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    Pour mener à bien sa mission, Hi! Paris embauchera 30 nouveaux professeurs « parmi les meilleurs au niveau international » et disposera à terme d’une équipe de 150 doctorants et de 30 postdoctorants. Le centre espère doubler le nombre de doctorants travaillant sur l’IA et la science des données, et parvenir à 500 étudiants à l’horizon 2025.

    Des moyens qui devraient lui permettre « d’être compétitif avec le top des universités européennes et mondiales ».

    L’IA ne se limite pas aux algorithmes

    L’alliance nouée entre HEC Paris et l’Institut Polytechnique de Paris pourrait surprendre, mais il fait sens selon le professeur Éric Moulines : « l’IA ne se limite pas aux algorithmes. C’est le sens de l’association entre IP Paris et HEC Paris. Dans les écoles d’ingénieurs, nous avons tendance à travailler sur tout ce qui est aspect méthodologique, développement de nouveaux algorithmes et de nouvelles théories qui expliquent ces algorithmes. Cette association ouvre sur les implications de l’IA et il y a une vraie complémentarité entre les deux établissements. De ce point de vue, Hi! Paris est vraiment un marqueur en France et se distingue en particulier des instituts dits 3IA, issus du rapport Villani, qui sont des instituts technologiques centrés essentiellement sur une problématique scientifique. »

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    Même son de cloche pour Thierry Foucault, professeur de finance au sein de HEC : « il y a un aspect qui est particulièrement novateur dans le Centre, c’est effectivement sa dimension multidisciplinaire. L’association d’un très grand institut de recherche en ingénierie dans les sciences dures avec une école de business de rang mondial est unique en France, et cela fait sens. Le rapport Villani s’intitulait “Donner du sens à l’IA”. Pour donner du sens à l’IA, il faut à la fois connaître les techniques de l’IA, mais également en saisir les implications sociales au sens large. Il est donc nécessaire de regrouper au sein d’un même centre de recherche des chercheurs d’expertises différentes, couvrant à la fois la science des données et les sciences sociales (gestion, économie, droit, psychologie, etc.) et d’encourager une approche multidisciplinaire des questions posées par l’IA. »

    Réduire l’empreinte carbone de l’IA

    Comme de nombreuses institutions, Hi!Paris s’est lancé dans les fameux hackathons baptisés Hi!ckathon pour l’occasion. Parmi les thèmes abordés, figure la question environnementale : comment faire pour que l’IA ne fasse pas de mal à la planète. Car, si l’intelligence artificielle est très prometteuse sur le plan technologique, elle est également très gourmande en énergie, notamment pour « entraîner » l’IA.

    Les algorithmes d’apprentissage automatique utilisent en effet des « données d’entraînement » pour produire des résultats. Les experts réunis par Hi!Paris ont donc planché sur la réduction de l’empreinte carbone de l’IA.

    Trois pistes de travail ont été tracées : donner de la visibilité à l’empreinte CO² causée par les outils de l’IA, modifier la façon dont les réseaux neuronaux sont formés, et s’assurer de minimiser l’empreinte carbone de la puissance de calcul consommée.

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    Si ces pistes de travail paraissent abstraites au premier abord, elles n’en sont pas moins encourageantes lorsque l’on sait que les experts estiment que, depuis 2012, la quantité de calcul utilisée dans les processus d’entraînement de l’IA s’accroît de façon exponentielle.

    Un financement en rupture avec le modèle existant

    Doté d’un budget annuel de 50 millions d’euros, Hi!Paris a fait un choix radical : recourir au secteur privé et au mécénat, car « la réussite de ce projet nécessite une rupture avec le modèle existant ». Cinq très grandes entreprises contribuent donc au financement du centre : L’Oréal, Capgemini, Total, Kering et Rexel.

    « Sans leur soutien et leur financement, ce nouveau Centre n’aurait pas vu le jour », font valoir les porteurs du projet. « C’est grâce à eux, et aux autres mécènes français et européens qui les rejoindront, que les activités de recherche et d’enseignement seront renforcées pour accroître ainsi le niveau de compétitivité de la France sur cette thématique fondamentale et prioritaire.»

    À première vue, la présence de L’Oréal — numéro un mondial de l’industrie cosmétique avec un chiffre d’affaires de près de 30 milliards d’euros en 2019 — peut surprendre. Mais, à y regarder de plus près, cette présence n’est pas le fruit du hasard. Depuis sa fondation en 1909, le géant français de la cosmétique a toujours misé sur la science pour assurer sa croissance.

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    Aujourd’hui, il suit attentivement ce qui se passe dans les laboratoires dédiés à l’IA. L’Oréal recourt en effet aux technologies avancées pour créer de nouveaux produits, mais aussi pour mieux connaître sa clientèle internationale. En 2018, L’Oréal avait procédé à l’acquisition de société canadienne Modiface, spécialisée dans la réalité augmentée et l’intelligence artificielle appliquées à la beauté.

    Autre mécène, Kering dispose depuis plusieurs années d’un pôle d’analyse des données. Pour François-Henri Pinault, PDG du groupe spécialisé dans le luxe (Yves Saint Laurent, Bottega, Gucci, Boucheron…), contribuer au développement de Hi!Paris s’inscrit dans une logique d’entreprise. 

    « Le soutien que nous lui apportons témoigne de notre volonté de participer au renforcement d’un centre français en matière d’analyse de la donnée et d’intelligence artificielle avec pour objectif les applications dans l’économie et la société. »

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