Sommaire du dossier :
- Les archives de 14-18 sur tous les fronts multimédias
- Centenaire de 14-18 : la Grande collecte ou les archives en mode 2.0
- Archives : quand la guerre de 14-18 passe par la numérisation
- Apocalypse : les archives de 14-18 font leur cinéma
- Léon Vivien, un poilu sur Facebook !
Pour le centenaire de la guerre de 14-18, les archives montent au front ! L’événement connaît une ampleur nationale. Il en résulte des publications et valorisations sous des formes très diverses : portails web, ouvrages, documentaires télévisés, pages Facebook. Les archives sont plus que jamais multimédias.
Les archives sont mises à l’honneur en 2014. Le centenaire de la guerre de 14-18 se prête en effet particulièrement bien à l’exploration du patrimoine documentaire français. Affiches, lettres de soldats, photographies, journaux de tranchées, carnets de dessins, presse… autant de pièces qui sont proposées au grand public grâce à un vaste programme de valorisation. Il y en a pour tous les goûts. Le visiteur a le choix entre les expositions physiques organisées dans les bibliothèques, les services d’archives départementales et les musées. Il peut également consulter les nombreux ouvrages d’archives publiés à l’occasion de ce centenaire. Il peut enfin naviguer sur le web où d’innombrables sites et portails ont été créés à l’initiative des archivistes, des bibliothécaires et des responsables de musées.
C’est le cas dans l’Est de la France. La région de Verdun fut le théâtre en 1916 de l’une des plus sanglantes batailles de la Première Guerre mondiale. En dix mois d’affrontements, Français et Allemands se livrèrent un combat sans merci. Le bilan des pertes humaines laisse sans voix : près de 700 000 morts et plus de 400 000 blessés de part et d’autre. La célèbre « bataille de Verdun » reste dans l’imaginaire collectif comme une boucherie et l’une des plus épouvantables séquences de la Première Guerre mondiale. En 2006, à l’occasion du 90e anniversaire de la bataille de Verdun, la communauté de communes de Verdun créait un fonds d’affiches éditées pendant la Première Guerre mondiale. La collection compte aujourd’hui plus de 330 documents d’origine française, allemande, russe, anglaise, américaine et italienne. On y trouve des affiches appelant les citoyens à souscrire à l’emprunt national « pour la victoire ». D'autres glorifient la solidarité entre troupes alliées.
Toutes ont été numérisées et mises en ligne sur le site des bibliothèques de Verdun. Chacune d’entre elles a fait l’objet d’un traitement documentaire complet : titre, illustrateur, imprimeur, cote, origine, technique, description… Le coût total d’acquisition de ces affiches s'élève à 85 672 euros. Leur numérisation a été réalisée en interne par les services de la collectivité de Verdun.
Autre source d’information, la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale propose ses « trésors d’archives » sur un site spécialement créé pour l’occasion. Des milliers de documents provenant de différentes institutions peuvent y être consultés dans une remarquable interface. Y est en particulier présenté le projet « Paris est un leurre » imaginé par l'état major français : un faux Paris reconstitué à quelques kilomètres de la capitale afin de duper les pilotes allemands et déjouer les bombardements aériens !
La Mission Centenaire 14-18 propose également une sélection d’archives du ministère des Affaires étrangères en particulier l’ouvrage L’écho français du Mexique qui rend « hommage aux Français du Mexique tombés au champ d’honneur, blessés ou prisonniers en Allemagne »...
Les archives départementales sont aussi à l’honneur avec les fonds provenant, entre autres, de la Manche, de la Marne ou du Territoire de Belfort. Ce dernier a ainsi fourni une série de photographies illustrant la vie quotidienne du département pendant la guerre. À noter que l’écosystème numérique de la Mission Centenaire 14-18 comprend aussi des comptes Facebook, Twitter, Google+, LinkedIn, Pinterest et Viadeo.
Avec plusieurs bases de données dédiées aux militaires décédés pendant la Grande Guerre, le site Mémoire des Hommes fait figure de ressource documentaire incontournable. Une première base recense plus de 1.3 million de fiches individuelles numérisées de soldats « morts pour la France ». Une deuxième base est constituée de plus de 70 000 fiches numérisées de soldats ayant servi dans l’aéronautique militaire.
Enfin, une dernière base présente les images numérisées de la production documentaire des unités engagées dans les combats : journaux de marche, carnets de comptabilité en campagne, journaux de bord… Les archives de toutes les unités engagées dans ce conflit ont été numérisées à l’occasion du 90e anniversaire de la Première Guerre mondiale. La consultation en ligne est facilitée par des instruments de recherche tels que des répertoires, des catalogues ou des guides. Un tutoriel vidéo est également disponible pour les internautes qui n’ont pas l’habitude d’interroger des bases de données.
Les journaux des unités (1914-1918) ont été numérisés et classés par unité puis par période chronologique (armée de Terre et Marine) ou par chapitre de document (aéronautique militaire).
Signalons également le portail très documenté mis en ligne par la Bibliothèque nationale de France. De nombreux documents permettent de saisir le conflit dans ses multiples dimensions y compris les plus sordides, mais aussi les plus intéressantes : comment a-t-on géré les morts alors que plus de 140 000 soldats français sont morts en cinq jours seulement ?
À l’étranger, le centenaire de la Grande Guerre a également donné lieu à des projets documentaires en ligne. C’est le cas du Canada dont l’effort de guerre doit être souligné : plus de 600 000 personnes avaient été mobilisées dans le corps expéditionnaire canadien alors que le pays ne comptait que huit millions d'habitants. Le site officiel Bibliothèque et Archives Canada leur rend hommage avec la mise en ligne de deux bases de données : la première comprend les « dossiers de service » des soldats ; la seconde donne accès aux « journaux de guerre » produits par les différentes unités engagées. Il est vivement recommandé de lire attentivement l’aide à la recherche qui fourmille de conseils méthodologiques. Tous les dossiers de soldats n’ont pas été numérisés, mais, le cas échéant, celui-ci est alors disponible au format PDF.
Les « dossiers de service » contiennent jusqu’à plusieurs dizaines de formulaires relatifs à la vie du soldat : formation, antécédents médicaux, discipline, décorations reçues… Quant aux « journaux de guerre », ils offrent une vision de la guerre par la hiérarchie militaire canadienne à travers des observations et des rapports d’étonnement. Le Royaume-Uni, de son côté, propose un site dédié à la « First World War » sous l’égide de son service d’archives nationales. Au menu, de nombreuses archives consacrées aux neuf millions d’hommes et de femmes enrôlées dans les troupes britanniques.
+ repères
Édition
Jours de guerre 1914-1918, les trésors des archives photographiques du journal L’Excelsior. Jean-Noël Jeanneney. Éditions Les Arènes. 2013.
Le quotidien L’Excelsior fut l’un des premiers à utiliser la photographie pour illustrer ses articles. La Guerre de 1914-1918 sera l’occasion pour les photographes de documenter une guerre épouvantable aussi bien dans les tranchées au plus près des soldats qu’à l’arrière : usines, hôpitaux, campagnes, villes… Ce bel ouvrage dirigé par Jean-Noël Jeanneney révèle des fonds inédits issus des archives photographiques de L’Excelsior.
Un siècle plus tard, un constat s’impose : les clichés réalisés entre 1914 et 1918 par les journalistes de L’Excelsior sont tout simplement remarquables. « Les chercheurs d’or éprouvent une émotion forte lorsque surgit devant eux le gisement longtemps rêvé. Telle fût la nôtre au moment de découvrir celui sur lequel ce livre est fondé » souligne Jean-Noël Jeanneney.
Les archives de L’Excelsior rassemblent près de 20 000 plaques de verre. Cet ouvrage en propose 800 qui donnent à voir la boucherie dans les tranchées, mais aussi la vie civile qui se poursuit par ailleurs. Clichés effrayants que ces gueules cassées et ces corps détruits… Clichés étonnants que ces parties de base-ball et ces grèves organisées contre la vie chère en mai 1917 !
La Grande Guerre en relief. Jean-Pierre Verney, Éditions Les Arènes. 2013.
Au début des années 1900, les Français se passionnèrent pour la stéréoscopie, ce système qui permet de voir des photographies en relief à l’aide d’une paire de lunettes spéciales. Les éditions des Arènes ont eu la bonne idée de proposer ce coffret contenant une paire de lunettes stéréoscopique, 35 stéréogrammes (photographies compatibles avec la vue en relief), et un album racontant la guerre de 14-18 à travers les archives et les photographies.
Le principe est extrêmement simple : il suffit de placer le stéréogramme sur les lunettes et de regarder… « Au bout de quelques secondes, les deux clichés vont se superposer et vous ne verrez qu’une photo en relief », précise le mode d’emploi. On peut ainsi voir les soldats rassemblés dans les tranchées, une opération médicale sur une « gueule cassée » ou une interminable colonne de prisonniers allemands.
Quant à l’album contenu dans ce coffret, il est signé Jean-Pierre Verney le collectionneur à l’origine du Musée de la Grande Guerre de Meaux. Y sont présentés, sous forme chronologique, les temps forts d’une guerre qui fut une épouvantable épreuve pour les soldats. Entre « l’Europe insouciante » de juillet 1914 et « les clairons de l’Armistice » le 11 novembre 1918, le conflit aura provoqué la mort de plus de 9 millions de personnes, dont 1,4 million de Français.
Le Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux – Un nouveau regard sur 14-18. Éditions du Cherche-Midi. 2011.
Le Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux (Seine-et-Marne) abrite l’une des plus belles collections consacrées au premier conflit mondial. "La prodigieuse collection qui a rendu possible l'édification de ce musée a permis de situer les objets dans l’histoire sans qu’ils se contentent d’en illustrer la galerie » souligne l’historien Marc Ferro disparu, dans l’avant-propos de cet ouvrage très richement illustré.
Y sont en effet recensés les milliers d’objets qui ont accompagné la grande boucherie que fut la guerre de 14-18. Ce sont les armes à feu et armes blanches, costumes et équipements du soldat, affiches de propagande, couverts réglementaires, standard téléphonique portable, matériel médical, objets d’art créés par les combattants, prothèses…
Rassemblés par le collectionneur Jean-Pierre Verney, ces milliers d’objets ont été collectés pendant plusieurs décennies en France et à l’étranger. Ils sont aujourd’hui présentés au Musée de la Grande Guerre et également décrits dans cet ouvrage. On y trouve également plusieurs textes qui permettent de mieux saisir ce que fut le premier conflit mondial : « une guerre nouvelle avec de nouvelles techniques pour une horreur renouvelée ».
À lire aussi : La Grande Guerre des images - La propagande par la carte postale 1914-1918. Claude Morin, éditions À part Buissonnière. 2013.
+ repères
Expositions
Paris 14-18, la guerre au quotidien
Cette exposition propose un reportage photographique de Charles Lansiaux (1855-1939) réalisé dans la capitale pendant la guerre. Galerie des bibliothèques de la ville de Paris. Jusqu’au 15 juin 2014.
Sénat
Le Sénat organise une exposition photographique sur les grilles du jardin du Luxembourg. Les 80 clichés de Michael Saint Maur Sheil peuvent être observés gratuitement. Jusqu’au 3 août 2014.
Visages et vestiges de la Grande Guerre
La Gare de l’Est, à Paris, fut le lieu emblématique du départ des soldats français pour le front. Cette exposition s’attarde sur les visages et les objets de l’époque. Du 23 juin au 30 novembre 2014.
Les rencontres photographiques d’Arles
Les rencontres photographiques d’Arles (Bouches-du-Rhône) proposeront, du 7 juillet au 21 septembre 2014, une exposition intitulée 40 000 monuments pour 1 350 000 morts pendant la guerre de 14-18. Elle prendra la forme d’un recensement photographique de tous les monuments aux morts érigés sur le territoire français.
14-18, Lyon sur tous les fronts
La Bibliothèque municipale de Lyon proposera une exposition autour du rôle de la capitale des Gaules pendant le conflit : affiches, films, lettres, journaux de tranchées, récits manuscrits… Automne 2014.