Créer de petites bibliothèques citoyennes dans les régions rurales et violentes de l'Afghanistan est la mission portée depuis huit ans par un jeune étudiant.
A seulement 22 ans, Matiullah Wesa a déjà créé sept bibliothèques citoyennes dans les provinces les plus violentes de son pays, l'Afghanistan. A Helmand, Kandahar, Khost, Kunar ou encore Wardak, ce jeune étudiant en sciences politiques collecte depuis huit ans des livres tout en cherchant des habitants susceptibles d'accueillir chez eux ces modestes bibliothèques à l'immense vocation : diffuser le savoir malgré les privations culturelles infligées par la guerre qui sévit depuis les années 90.
Plus d'argent, plus de livres
C'est en voyant son père travailler sans relâche à la réouverture d'écoles fermées à cause des conflits et à apporter des livres dans les zones rurales les plus touchées que le jeune Afghan, encore adolescent, a décidé lui aussi de s'investir. En 2008, il crée même une association, The Pen Path ("la voie de la plume"). "Chaque fois qu'il trouvait de l'argent, on le voyait revenir avec plus de livres", raconte au New York Times son frère aîné, Wali Muhammad, officier de l'armée.
Installée aujourd'hui à Spinbaldak, la famille Wesa a ouvert au public (hommes, femmes et enfants) une petite bibliothèque de 4 000 livres, soigneusement rangés sur des étagères métalliques, et qui entourent quelques matelas et couvertures, un chauffage au gaz pour les lectures hivernales, un cendrier et un crachoir pour le tabac à chiquer.
Concentrer les efforts en dehors des villes
Matiullah Wesa déplore le manque de moyens et la corruption qui empêchent la remise en service des écoles, notamment celles des régions du sud et de l'est de l'Afghanistan, durement touchées ces quinze dernières années. "Le problème est qu'une grande partie de l'effort a porté sur les villes, explique-t-il ; nous devons donc commencer dans les villages. Si cette bibliothèque était dans une grande ville, nous aurions 100 visiteurs par jour. Mais pour moi, les cinq visiteurs que nous avons ici aujourd'hui sont bien plus importants".
Un don de 20 000 livres
Le jeune Afghan prévoit d'ouvrir encore plusieurs petites bibliothèques de ce type cette année en élargissant son réseau de volontaires à travers le pays. Un riche homme d'affaires philanthrope lui a même promis un don de 20 000 livres si le jeune homme acceptait d'ouvrir une bibliothèque à l'est du pays, et à la condition que celle-ci soit baptisée du nom de son père. "Je lui ai dit que je pourrais lui donner en plus le nom de sa mère, a déclaré Matiullah Wesa, au mépris des convenances ; tout ce qu'il faut pour obtenir des livres !"