Les sénateurs prônent la création d'un Conseil mondial de l'Internet et la refondation de l'ICANN.
"L'affaire Snowden est arrivée comme une bénédiction pour sensibiliser les citoyens aux enjeux d'Internet" soulignait ce matin Gaëtan Gorce en guise de présentation du rapport d'information consacré à la gouvernance d'Internet. Pour le sénateur (PS, Nièvre) et président de la Mission commune sénatoriale dédiée au numérique, les révélations de l'ancien informaticien de la NSA (National Security Agency) montrent à quel point Internet est devenu un enjeu politique dominé par les Etats-Unis aux dépens de la France et de l'Union européenne.
Un constat qui a conduit le Sénat à plancher pendant plus de six mois sur le numérique et à "proposer un nouveau modèle de gouvernance de l'Internet". Parmi les 63 recommandations exposées dans ce rapport, la première vise à refonder la gouvernance d'Internet autour d'un "traité international ouvert à tous les Etats et par une forme de ratification en ligne par les internautes". Les sénateurs souhaitent inscrire ce traité dans l'esprit de la conférence NET Mundial qui s'est tenue au mois d'avril dernier à Sao Paulo. Conséquence : l'actuel Forum pour la Gouvernance de l'Internet serait transformé en Conseil mondial de l'Internet chargé de contrôler la conformité des décisions prises dans les différentes instances de gouvernance (W3C, serveurs racines, Internet Society...).
Yes WICANN !
Le rapport sénatorial prône également une refondation de l'ICANN (la société qui attribue les noms de domaine et les numéros sur Internet) pour en faire une WICANN (World ICANN). La nouvelle entité ne serait alors plus soumise au droit californien mais relèverait "du droit international ou, de préférence, du droit suisse sur le modèle du Comité international de la Croix Rouge". La WICANN serait alors responsable devant le Conseil mondial de l'Internet.
La dimension industrielle du numérique n'a pas été oubliée par les sénateurs qui recommandent "une stratégie industrielle européenne pour maîtriser nos données et porter nos valeurs". On retiendra l'idée de lancer deux projets industriels concrets : un cloud européen sécurisé et le développement d'un système d'exploitation pour mobile.
Pour la sénatrice Catherine Morin-Desailly (UDI-UC, Seine-Maritime) et rapporteure du rapport sénatorial, ces objectifs ne se feront pas véritable stratégie d'influence : "il faut accroître la présence européenne dans les instances de standardisation de l'Internet". Reste à convaincre les Etats-Unis d'abandonner tout ou partie de leur influence dans l'économie numérique mondiale qu'ils dominent aujourd'hui de la tête et des épaules...