Quand les datas deviennent une véritable matière sur laquelle se basent les debriefings de match puis s'élaborent les entraînements.
Si les Bleus produisaient autant d'essais que de données, leur victoire lors de la Coupe du monde de rugby, qui s'ouvre aujourd'hui en Angleterre, serait assurée ! Depuis 2011, les joueurs français se sont en effet jetés dans la mêlée du big data en s'équipant d'un GPS destiné à surveiller et améliorer toujours plus leurs performances.
Des performances améliorées de 10 %
Bien qu'ils soient loin d'être la seule à équipe à produire durant chaque match des milliards de datas (les rugbymen néo-zélandais et australiens ont recours à ce type de technologie en club depuis une quinzaine d'années déjà), le centre d'entraînement des Bleus assure que cette technologie augmenterait leurs performances de 10 %.
L'expérience a débuté en 2010 lorsque la fédération internationale World Rugby a autorisé l'utilisation d'outils GPS pour mesurer les performances des joueurs à l'entraînement, mais également lors des matchs. La Fédération Française (FFR) a alors fait le choix de développer son propre outil en collaboration avec les sociétés Digital Simulations et Thales.
Un GPS calé entre les omoplates
Un boîtier de monitoring de 80 grammes a alors été installé sous le maillot des joueurs, entre leurs omoplates. Celui-ci permet l'envoi et le traitement en temps réel des données de chaque joueur, transmises au préparateur physique qui peut les visionner en direct : fréquence cardiaque, vitesse instantanée, distance totale parcourue, nombre d'accélérations et même le nombre d'impacts (donnés et reçus) grâce à une centrale inertielle mesurant les accélérations à très haute intensité. Quand un GPS grand public ne mesure une position qu'une seule fois par seconde, l'outil de tracking des Bleus le fait 16 fois par seconde ; une précision indispensable pour mesurer les variations brusques de vitesse lors des accélérations.
Connaître l'activité réelle d'un joueur sur le terrain
"Le GPS permet de bien comprendre ce qui se passe durant un match de rugby, expliquait Didier Retière, alors entraîneur adjoint des Bleus au journal l'Equipe en 2011. Car, à la différence de l’athlétisme où l’on a une distance précise à parcourir, on a du mal à connaître l’activité réelle du joueur sur le terrain. Avec ce système, on évalue la charge du match sur le joueur et on peut adapter la récupération de manière individualisée. Surtout, on peut bien doser les quantités d’entraînement par rapport à ce que représente l’effort d’un match. Le but étant de faire travailler les joueurs au plus près de l’intensité d’un match sans les surfatiguer."
De leur côté, les joueurs peuvent également consulter ces données sur leur smartphone, via une application dédiée.
La réalité augmentée pour demain
Mais la FFR ne souhaite pas s'arrêter là et a déjà demandé à Digital Simulations de réduire le poids du boîtier GPS tout en augmentant sa précision. De plus, la réalité virtuelle pourrait s'inviter très bientôt lors des séances de débriefing : "Nous irons au-delà de l'analyse vidéo, s'enthousiasme Julien Piscione, responsable du pôle scientifique de la FFR à l'Usine Digitale ; On pourra revivre les matchs de l’intérieur. Cela améliorerait le travail de prise d’informations et de prise de décisions sur le terrain". Enfin, les Bleus testeraient actuellement un système de neurotracking développé par le canadien CogniSensAthlétiques : à l'aide d'un casque 3D les entraînant à suivre des balles de couleurs dans l'espace, les joueurs pourraient ainsi augmenter leur capacité à suivre des cibles mouvantes.
"Attention, précisait Julien Deloire, l'un des préparateurs physiques de l'équipe de France en 2011 ; il ne faut pas oublier l’essence de notre métier et être dépassé par la technologie." Nous leur faisons confiance et leur souhaitons bonne chance pour cette Coupe du monde !