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Innovation : penser "expérience utilisateur" peut faire la différence

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    L'architecte et modéliste 3D Katerina Kamprani a détourné une série d'objets du quotidien dans son projet "The Uncomfortable", pour révéler "l'essence de l'expérience avec l'utilisateur, [...] en soulignant les étapes de l'interaction avec l'objet" (DR)
  • Expérience utilisateur. Depuis qu'Apple en a fait son cheval de bataille, fabricants, éditeurs, prestataires et marketeurs n'ont que cette expression à la bouche. Un peu fourre-tout, elle a tendance à perdre de son sens. Alors qu'est-ce que l'expérience utilisateur ? Et pourquoi est-elle si importante ?

    Adapté de l'anglais « user experience » (UX), l'expérience utilisateur a été utilisée dans des articles scientifiques dès les années 70, mais c'est au début des années 90 qu'elle a été popularisée par Donald Norman, professeur de psychologie cognitive à l'université de San Diego. C'est lui qui, après avoir rejoint les rangs d'Apple, a préféré parler d'expérience utilisateur au lieu de "human interface". Il s'agissait pour lui de prôner le changement chez Apple dans le but d'avoir une approche globale des produits.

    « J'ai inventé l'expression car je pensais que interface humaine (human interface) et utilisabilité (usability) étaient trop limitées, expliquait-il en 2008. Je voulais couvrir tous les aspects de l'expérience d'une personne avec un système, en considérant le design industriel, le graphisme, l'interface, l'interaction physique et le manuel d'utilisation. Depuis l'expression a tellement été diffusée qu'elle a commencé à perdre de son sens ».

    Bénéfice ressenti

    L'UX qualifie le bénéfice ressenti par l’utilisateur lors de l’utilisation d’un produit, d'une application, d'une solution ou d’un service. L'expérience utilisateur ne se mesure donc pas de manière objective, même si, au ressenti et à la perception de l'individu, s'ajoute un bénéfice rationnel et mesurable.

    L'expérience utilisateur reste en grande partie subjective. En effet :

    « le langage (textuel ou métaphorique) de l'interface, la manipulation du système (au doigt, à la souris, à la voix, au geste, etc.) ne sont pas compris, ressentis ni maîtrisés uniformément, explique Sylvie Daumal, auteur de "Design d'expérience utilisateur" (Eyrolles, 2015). La perception varie d'une personne à l'autre ».

    Un facteur différenciant dans le choix d'un service

    L'utilisateur est aujourd'hui placé au centre des préoccupations. Rien ne se fait sans son aval. Ana Favier, directrice administratif et financier adjointe du groupe Jardiland, nous explique par exemple que la solution de dématérialisation des demandes d'achat et des factures fournisseurs de l'enseigne a d'abord été choisie parce qu'elle était « user friendly » (autrement dit facile à prendre à main facile à comprendre et à utiliser). Sans cette qualité, les 83 magasins du groupe n'auraient certainement pas adopté aussi facilement ce nouvel outil. 

    L'expérience utilisateur, c'est ce qui permet de différencier un service ou une solution d'un(e) autre.

    L'expérience utilisateur : du marketing déguisé ?

    Créer une solution, une application ou un produit numérique ne se fait donc plus sans tenir compte du ressenti de l'utilisateur, ou du moins, sans le prévoir. Voilà pourquoi plusieurs domaines de compétences collaborent : le chef de projet qui assure l'architecture de l'information, le directeur artistique qui se focalise sur l'ergonomie et teste les interfaces, et le développeur qui apporte sa créativité au design d'interaction. 

    Toute la difficulté réside dans le fait de concilier la stratégie du commanditaire (vendre une solution, augmenter le panier moyen, inciter à l'usage, etc.) et les attentes de l'utilisateur (profiter d'un service, d'un catalogue plus important, d'une interface simple, etc.). 

    Tout cela ressemble finalement à du marketing. C'est la remarque qui est un jour faite à David Serrault, responsable UX design chez Axa. 

    « Il est probable que certaines méthodes se rejoignent, mais la différence est dans doute dans l'objectif, analyse-t-il. Le marketing se concentre sur la promesse, l'UX design tente de la tenir ».

    A la recherche de l'émotion

    Sur un marché toujours plus concurrentiel, les UX designers s'apparentent donc désormais à de véritables gourous. Il est d'ailleurs important de distinguer le rôle de l’UX designer et celui de l'UI (user interface) designer. Alors que l’UI designer limite son travail à l’optimisation des parcours utilisateur, l’UX designer doit procurer à l’utilisateur, en plus de la simplicité d’usage, une émotion, un plaisir. La recherche de l’émotion devient ainsi le moteur de la création et, pour ce faire, le storytelling est un outil efficace pour l’UX designer. 

    Car ce sont bien les utilisateurs, les véritables héros de l'histoire, et non l'entreprise.

    « L’user expérience et l’user interface sont sans doute les termes les plus confondus et mal interprétés du milieu, explique Rahul Varshney, consultant associé chez PwC. Un UI sans un UX, c’est comme un peintre appliquant sa peinture sur sa toile sans aucune réflexion. De même, un UX sans un UI, c’est comme une armature de sculpture sans le papier mâché à l’intérieur. Les deux sont donc complémentaires et indispensables pour le succès d’un produit ».

    Le design thinking, une méthode d'innovation

    « L’expérience utilisateur englobe tous les aspects de l’interaction de l’utilisateur final avec une entreprise, ses services et ses produits, résume Don Norman. La première exigence d’une expérience utilisateur réussie est de répondre aux besoins exacts d’un client, sans difficulté, ni effort. Ensuite vient la simplicité et l’élégance qui donnent naissance à des produits désirables et plaisants dans leur usage ». 

    C'est ainsi qu'à l'expérience utilisateur s'ajoute la notion de « design thinking », qui désigne l'ensemble des principes ergonomiques et esthétiques employés pour concevoir de nouveaux produits et solutions. Le « design thinking » est une sorte de philosophie de la créativité. 

    « Parmi les marques qui intègrent le design thinking au coeur du processus d’innovation, on peut citer Apple, Dyson, Samsung, Swatch ou encore Decathlon », ajoute Jean-François Marti, dirigeant de l'agence de conseil en stratégie, ergonomie et design web et mobile, Nealite, qui fait désormais partie du département digital de PwC.

    Le design, ce n'est pas juste le look 

    Les entreprises les plus innovantes sont, en effet, celles qui considèrent le design comme un aspect stratégique, et non subalterne, de leur activité. 

    « Les entreprises doivent considérer le designer comme source de profit et non comme coût », insiste Cédric Borderie, dirigeant de l'agence digitale CreaSenso. 

    Plus qu’un simple packaging, le design doit être perçu comme véritable source d’innovation. D'ailleurs en 2003, quatre ans avant le lancement de l'iPhone première génération, Steve Jobs a mis les choses au point et expliqué au New York Times que « la plupart des gens font l'erreur de penser que le design, c'est l'apparence. Ce n'est pas notre avis chez Apple, arguait-il avec aplomb. Le design, ce n'est pas seulement l'apparence et le style. Le design, c'est comment ça marche ».


    + repères

    Recrutez un UX dDesigner

    L'UX designer a pour mission de définir l’expérience utilisateur sur l’ensemble des dispositifs mobiles, web, TV ou dans le cadre d’applications logicielles. 

    Son travail suit un processus déterminé : observation des situations d'usage d'un produit ou d'un service, formalisation des recherches, tests auprès des utilisateurs et établissement des recommandations. Il définit l’architecture de l’information en interfaces et spécifications fonctionnelles en se basant sur les besoins des utilisateurs. Il est en quelque sorte le chef d’orchestre de l’ergonomie et collabore avec les équipes de direction artistique et projet afin que les axes majeurs de l’expérience utilisateur soient clairement identifiés et intégrés. 

    Ses qualités et compétences :

    • Capacités de compréhension et d’analyse du comportement des utilisateurs ;
    • Maîtrise des différents outils de wireframing (Axure, Balsamiq, InVision, InDesign, ProtoShare) ;
    • Connaissance des principaux CMS et langages de programmation (HTML/​CSS, Javascript, PHP, Ruby​) ;
    • Excellent relationnel ;
    • Empathie ;
    • Capacité à travailler en équipe pluridisciplinaire ;
    • Capacité à synthétiser des problématiques complexes ;
    • Appétence pour les nouvelles technologies.
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    Commentaires (1)

    • Portrait de HMA

      Je pense que l'expérience utilisateur est l'une des clés à prendre en compte dans tout processus d'innovation. Aussi il faut pouvoir optimiser et piloter les processus d'innovation et le ROI de celui-ci. En effet, une entreprise qui veut vendre un nouveau produit, ou en réviser, a des dizaines de caractéristiques à prendre en compte telles que la documentation, les ingrédients, l’étiquetage, le dimensionnement, l’approvisionnement, les fournisseurs, la réglementation, etc. Les experts Lascom offrent ainsi les méthodes et bonnes pratiques à mettre en place au travers d'un guide pratique disponible en téléchargement gratuit en cliquant ici http://www.lascom.fr/fiches-pratiques/dossier-optimiser-et-piloter-son-roi-de-linnovation/

      juin 21, 2016
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    Êtes-vous prêts à renoncer à des services numériques ou à vos appareils électroniques pour le bien commun ? Face à l'urgence climatique, notre rapport au progrès et à la technologie est souvent remis en question. Archimag Podcast a rencontré Alexandre Monnin, philosophe, directeur du master Sciences, Stratégie et Design pour l’Anthropocène à l’ESC Clermont Business School et auteur de l'ouvrage "Politiser le renoncement", aux Éditions Divergences. Il est aussi co-initiateur du courant de la redirection écologique, dont il nous explique le principe.
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