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En 1872, l’École libre de sciences politiques voyait le jour à l’initiative d’Émile Boutmy. Au lendemain de la défaite de 1870, le politologue souhaitait doter la France d’un institut capable de former les futures élites d’une nation éreintée et épuisée. 150 ans plus tard, Sciences Po célèbre son anniversaire en grande pompe et revisite son histoire grâce à un patrimoine documentaire unique.
Naguère dispersées sur plusieurs sites parisiens, ces archives ont été en grande partie rassemblées au 28, rue Saint-Guillaume à la faveur de la création récente du Département Archives qui compte neuf personnes. « La création de ce nouveau service permet de donner de la visibilité et de faciliter l’accès à nos archives », explique Odile Gaultier-Voituriez, Responsable du Département Archives.
Dans les sous-sols du bâtiment, plusieurs rayonnages mobiles de la marque Compactus® installés par la société Bruynzeel hébergent la mémoire de l’institution. À commencer par « les archives du politique » qui sont probablement celles qui éveillent le plus de curiosité.
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On y trouve notamment le fonds des archives électorales du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) qui couvre près d’un siècle d’élections : des affiches, des professions de foi, des programmes, des objets dérivés…
Bonne nouvelle : ce fonds est en partie numérisé par la bibliothèque et mis à disposition des internautes sur la bibliothèque numérique de Sciences Po, sur Internet Archive et interrogeable sur une nouvelle interface : Archelec Explorer.
Les archives du politique sont également constituées de fonds de personnalités politiques comme ceux de l’ancien Premier ministre Maurice Couve de Murville (1907 - 1999). D’une longueur de 1,4 mètre linéaire, ce fonds couvre près de quatre décennies de vie politique à travers des discours, des notes manuscrites et des entretiens.
Transition vers la production de documents nativement numériques
Les « archives institutionnelles », quant à elles, concernent la production documentaire des directions et des services de Sciences Po.
L’année 2021 a été marquée par l’entrée de 163 mètres linéaires contre 655 mètres linéaires en 2021.
Une baisse qui ne doit rien au hasard : « ces chiffres montrent une forte réduction du volume d’entrées liée à la transition vers la production de documents nativement numériques » explique l’institution.
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Un troisième pôle baptisé « archives de la recherche » rassemble des fonds produits par les chercheurs en science politique ou en sociologie ; des enquêtes, des entretiens…
On y trouve les enquêtes et fonds d’archives de quelques-uns des chercheurs les plus influents de l’institution : Pascal Perrineau, Nonna Mayer…
Une partie de ces entretiens a été numérisée et mise en ligne sur l’entrepôt de données de la recherche de Sciences Po. Lancée en février 2020, cette plateforme a vocation à préserver et partager les données de la recherche en sciences humaines et sociales collectées ou traitées à Sciences Po, ainsi que dans d’autres institutions.
Depuis 2014, une convention tripartite entre Sciences Po, les Archives nationales et le remettant d’archives mixtes prévoit le traitement, la communication et la valorisation scientifique des archives privées et des archives publiques. Ces dernières sont remises à l’institution pour une durée de quinze ans.
Au terme de cette période, elles sont remises aux Archives nationales. « Cette convention permet de collecter des fonds qui ne seraient pas forcément directement entrés aux Archives nationales » précise Odile Gaultier-Voituriez.
Entretien individuel d’aide à la recherche
Qu’ils soient étudiants, chercheurs ou extérieurs à l’établissement, les usagers peuvent compter sur un accompagnement : « nous proposons notamment aux étudiants un accueil personnalisé et un entretien individuel d’aide à la recherche » souligne Emeline Grolleau, archiviste chargée des Archives du politique ; « cet entretien dure environ une heure et demie et il correspond à l’ADN de notre établissement en matière d’accompagnement des étudiants ». L’an dernier, une trentaine de lecteurs ont bénéficié de cette prestation.
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Au quatrième étage du 28, rue Saint-Guillaume, la salle de lecture peut accueillir jusqu’à sept usagers. Sans surprise, leur profil fait apparaître une majorité d’enseignants-chercheurs et de doctorants.
Les étudiants, archivistes, administratifs, iconographes, journalistes, et écrivains font également partie du public le plus régulier. En 2021, les fonds les plus consultés ont été celui de Gaston Monnerville (président du Sénat) suivi par celui de la famille Coubertin, dans la perspective des Jeux olympiques de 2024.
Politique commune de records management
À Sciences Po comme ailleurs, l’archivage se conjugue désormais sur le mode numérique. Un projet d’archivage électronique a été lancé afin de mettre en place un système d’archivage électronique (SAE) et une politique de records management commune à l’ensemble des directions de l’établissement.
« Nous sommes actuellement en phase d’étude » explique l’archiviste Radouan Andrea Mounecif ; « nous avons constaté une forte demande de nouveaux outils comme la signature électronique et le coffre-fort électronique. Sans aucun doute, la crise sanitaire et le télétravail ont accéléré le mouvement vers la numérisation de nos processus ».
Ce chantier transverse piloté par deux départements de la bibliothèque implique plusieurs directions et devrait aboutir à l’acquisition d’une solution de gestion électronique des documents vitaux pour l’institution à l’horizon 2023.
Et à l’heure de la sobriété numérique, Sciences Po porte également une attention particulière à la pollution digitale via des indicateurs internes qui auront vocation à réduire l’empreinte numérique de l’institution.