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En Belgique, les archivistes veulent poursuivre leurs missions malgré les restrictions budgétaires

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    L’AAFB, fondée en 2005, réunit plus de 120 membres passionnés par la gestion et la valorisation des archives et de l'information (Bruxelles, vue du Mont des Arts, Ank Kumar, Wikipedia).
  • Confrontés à de drastiques compressions budgétaires, les services d’archives belges estiment que l’heure de la mobilisation approche. Notre correspondante à Bruxelles présente l'état des lieux de la situation pour Archimag.

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    enlightened CET ARTICLE A INITIALEMENT ÉTÉ PUBLIÉ DANS ARCHIMAG N°381 : Protection des données en entreprise: quelle stratégie à l'ère de l'IA ?

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    Dans un monde où l’information est au cœur des enjeux stratégiques, les archivistes et gestionnaires de l’information font face à des défis croissants. Pourtant, depuis plusieurs années, ces professionnels doivent composer avec des ressources humaines et financières en constante diminution.

    En Belgique, la situation semble se compliquer davantage à la suite des élections de juin 2024. Les nouveaux gouvernements, qu’ils soient fédéraux, régionaux ou communautaires, multiplient les annonces de restrictions budgétaires. En 2025, la fonction publique et le secteur associatif, déjà fragilisés, subiront de lourdes répercussions et le secteur des archives ne sera pas épargné.

    Parmi les institutions scientifiques fédérales impactées, les Archives générales du Royaume (Archives de l’État) illustrent la gravité de la situation : ces dernières ont vu leur financement structurel diminuer de plus de 15 % au cours de la dernière décennie.

    Et malgré l’intégration du Cegesoma (ancien Centre d’étude et de documentation de la Seconde Guerre mondiale) et du service Archives des victimes de la guerre, le personnel de l’institution a décru de plus de 30 % en 20 ans (moins 2 % par an entre 2014 et 2019).

    Pourtant, les fonds patrimoniaux conservés ont augmenté dans le même temps de 30 %, pour avoisiner aujourd’hui les 360 kilomètres linéaires d’archives. Et, au vu des prévisions pour 2025, près de 30 équivalents temps plein sont menacés.

    Lire aussi : En Belgique, la dématérialisation des archives judiciaires passe mal

    Un décret qui suscite autant d’espoir que de préoccupations

    Du côté des centres d’archives privées, le décret ambitieux adopté en mai 2023, qui vise à reconnaître de nouvelles missions et à intégrer de nouveaux centres, suscite autant d’espoir que de préoccupations.

    En l’absence d’un budget dédié à sa mise en œuvre, le secteur pourrait perdre jusqu’à 10 équivalents temps plein d’ici 2026, soit près de 21 % de ses effectifs. Inquiets pour la situation et l’avenir de leurs centres, les professionnels n’ont pas tardé à se mobiliser.

    En décembre dernier, une délégation a rencontré la ministre de la Culture pour discuter de l’application du décret et des moyens insuffisants alloués. Bien que les représentantes de la ministre se soient engagées à défendre cette cause lors des discussions budgétaires d’avril 2025, les archivistes devront, d’ici là, composer avec des ressources largement insuffisantes pour remplir leurs missions.

    Ce paradoxe, où des avancées législatives se heurtent à des contraintes budgétaires, illustre les tensions auxquelles sont confrontées les institutions chargées de préserver notre mémoire collective.

    Lire aussi : Archivistes francophones : des défis et des problématiques similaires ?

    "Ce qui se joue, c’est l’avenir de notre profession"

    Pour Florian Delabie, président de l’Association des archivistes francophones de Belgique ASBL (AAFB), "l’absence de financement pour des acquis législatifs majeurs et les coupes budgétaires récentes risquent de rendre les métiers de l’archivage invisibles, voire superflus, dans le paysage institutionnel". Dans une tribune publiée en novembre 2024, il alerte sur les dangers pesant sur l’ensemble du secteur et appelle les professionnels à s’unir et se mobiliser.

    Il souligne l’importance de rassembler des données précises afin d’étayer les revendications du secteur et de coordonner une action nationale de sensibilisation. "Ce qui se joue aujourd’hui, c’est l’avenir même de notre profession, de nos emplois et de notre contribution à la démocratie", écrit-il.

    Ce contexte de pénurie de moyens accentue la difficulté des défis auxquels sont confrontés les archivistes et professionnels de la gestion de l’information : assurer le maintien de leurs activités tout en continuant à se former et à défendre leurs compétences et plus-values dans un environnement professionnel de plus en plus concurrentiel.

    Alors que les informations engageantes et stratégiques des organisations sont confiées à de grosses sociétés informatiques sans garantie que celles-ci en assurent une préservation et une accessibilité démocratique, les professionnels que nous sommes se doivent de rappeler à nos décideurs et décideuses que les algorithmes ne pourront garantir seuls la bonne conservation de notre mémoire collective et que, sans moyens budgétaires suffisants, nous ne pourrons relever ce défi !

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    La mise à disposition des décisions de justice en Open Data a vu le jour grâce à la loi pour une République numérique votée en 2016. Les articles 20 et 21 prévoient la mise en open data des quatre millions de décisions de justice produites chaque année par les tribunaux français. Camille Girard-Chanudet est chercheuse en sociologie au sein du Centre d’étude des mouvements sociaux. En 2023, elle a soutenu une thèse devant l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) : "La justice algorithmique en chantier, sociologie du travail et des infrastructures de l’intelligence artificielle". Dans ce cadre elle a rencontré les équipes de la Cour de cassation qui procèdent à l’anonymisation des décisions de justice.

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