Poussée web du marché de l’information juridique

Barros

 

Selon une étude SerdaLab pour l'association Juriconnexion, le marché de l'édition juridique électronique a subi les effets de la crise économique, mais il reste une activité juteuse. Les éditeurs étendent leur présence sur les réseaux numériques et multiplient les services à destination des mobinautes.

Il s'agit certainement d'un signe des temps... Au mois d'octobre dernier, l'éditeur Lavoisier annonçait la fermeture définitive de son point de vente physique situé dans les beaux quartiers de la capitale, pour mieux se concentrer sur sa librairie numérique et la vente par correspondance : « Six ans après la création de son premier espace numérique, la Librairie Lavoisier ouvre une nouvelle librairie numérique E.lavoisier.fr », précisait l'éditeur. Avec 25 000 livres français et étrangers déjà disponibles sur cette nouvelle plateforme, Lavoisier confirme sa stratégie numérique y compris pour ses collections juridiques. Il n'est pas le seul. Le groupe d'édition Springer, spécialisé dans les sciences, techniques et médecine, mais qui possède également des collections juridiques, a annoncé que l'ensemble de son catalogue serait disponible au format numérique d'ici 2012.

Les acteurs du marché de l'information juridique ont enregistré un chiffre d'affaires de 249 millions d'euros en 2010, soit une hausse de 1,5 % par rapport à l'année précédente. Pour autant, cette croissance est moins forte que celle observée en 2008 qui avait atteint 2,7 %. Selon une étude réalisée par le cabinet SerdaLab pour l'association Juriconnexion, « la rentabilité du secteur a subi une très nette dégradation. Elle est passée de 17 % en 2007 à 12,5 % en 2009, soit une baisse respectivement de 7,6 %, puis de 20 % en 2009 ». Mais le marché de l'édition juridique se porte bien mieux que d'autres secteurs professionnels puisque « ses bénéfices atteignent encore 12,5 % du chiffre d'affaires, ce qui se trouve nettement au-dessus de l'ensemble de l'économie », souligne SerdaLab.

 éditeurs généralistes, pluridisciplinaires et monodisciplinaires

 Trois grandes catégories d'éditeurs composent le paysage des éditeurs juridiques : les généralistes, les pluridisciplinaires et les monodisciplinaires.

- Les éditeurs généralistes proposent une offre dans la quasi-totalité des domaines juridiques. Trois grandes griffes dominent le marché : Groupe Lefebvre Sarrut (Editions législatives, Dalloz, Francis Lefebvre, Editions Juris), LexisNexis (Jurisclasseur) et Wolters Kluwer (Editions Lamy Groupe Liaisons).

- Les éditeurs pluridisciplinaires, de taille moyenne, fournissent une offre dans plusieurs domaines : Afnor, Berger-Levrault, Direction de l'Information Légale et Administrative (Dila), Groupe Revue Judiciaire, Legal News, Lexbase, Lextenso,

- Quant aux éditeurs monodisciplinaires, de taille plus modeste et spécialisés dans un domaine, ils représentent une vingtaine d'acteurs : Argus de l'Assurance, Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, Editions Pierre Lechêne, La Gazette des Communes, Le Moniteur...

une prévision de croissance de plus de 7 %

Sur les 249 millions d'euros de chiffre d'affaires générés par le marché de l'édition juridique, la part du numérique représentait 28,6 %. Les prévisions de croissance sont estimées à plus de 7 % pour 2010. En moyenne, le numérique génère 34 % du chiffre d'affaires des éditeurs généralistes et a atteint 187 millions d'euros (2009). Cette proportion s'élève à 37 % pour les éditeurs pluridisciplinaires avec 47 millions d'euros en 2009. Elle n'atteint en revanche que 8 % du chiffre d'affaires des éditeurs monodisciplinaires avec 15 millions d'euros.

text mining, ergonomie et enrichissement des contenus

 Du côté des services numériques, les éditeurs veillent à améliorer constamment leur offre éditoriale. Le Groupe Editions Lefebvre Sarrut, par exemple, a lancé au mois de juin 2010 un nouveau service de valorisation de l'information baptisé « Jurisprudence chiffrée ». Adossé à la solution de text mining de Temis, il donne accès aux données chiffrées des 37 cours d'appel situées sur le territoire français. Sa marque phare Dalloz est par ailleurs particulièrement présente sur le web collaboratif à travers la blogosphère, les forums de discussion, YouTube et Facebook. Ses sites Dalloz Actualités et Dalloz.fr ont par ailleurs été refondus et gagné en ergonomie.

Wolters Kluver, de son côté, va décliner les titres de sa collection « Lamy Axe droit » au format électronique et proposer de nouvelles offres de bases de données juridiques à l'intention des petits cabinets d'avocats. Une nouvelle gamme de logiciels de gestion pour les avocats est également en cours de finalisation. Sa base de données juridiques en ligne 2LR Lamyline Reflex a été remplacée en 2010 par le site Lamyline.fr qui héberge un fonds documentaire particulièrement bien loti : 3,1 millions de documents, plus de 70 ouvrages des éditions Lamy et Liaisons, plus de 20 revues, 10 000 formulaires personnalisables en ligne...

Quant à LexisNexis, un nouveau service destiné aux notaires a fait son apparition : Soprano permet d'accéder de manière intuitive à des informations pratiques telles que la rédaction d'actes authentiques ou la gestion des études. D'autres services ont été récemment lancés : Juridesk (offre en ligne interfacée avec le Réseau Privé Virtuel des Avocats et rédaction assistée avec plus de 800 modèles d'actes disponibles), PolyOffice Plus (suivi des affaires, rentabilité des cabinets d'avocats, intégration du réseau e-barreau) sans oublier l'enrichissement des contenus de Jurisclasseur.

Tous investissent le segment de l'internet mobile et lancent des applications dédiées aux téléphones portables et aux tablettes numériques.

+ repères

passage à la mobilité

Alors que les Français plébiscitent les smart phones, il est désormais de plus en plus facile d'accéder à l'information juridique via un téléphone portable ou une tablette numérique. Les grands acteurs institutionnels tels que le ministère de la Justice, mais aussi les éditeurs privés proposent des applications gratuites et payantes.

Baptisée Mobidroits, l'application du ministère de la Justice offre un annuaire des juridictions, des fiches pratiques, ainsi qu'un flux d'informations provenant du ministère. Légifrance propose un accès au Journal Officiel ainsi qu'un triple corpus de jurisprudences : Conseil constitutionnel, administrative et judiciaire. Quant à l'Assemblée nationale et au Sénat, ils ne proposent pas à ce jour d'applications, mais ont conçu des versions optimisées de leur site pour les mobinautes. Au menu : ordre du jour des travaux parlementaires, compte-rendu des dernières séances, propositions de loi déposées par les parlementaires...

Du côté des éditeurs privés, Dalloz, les Editions Francis Lefebvre, Wolters Kluwer, Legalnews, Le Moniteur déclinent leur présence numérique avec des applications pour iPhone, iPad, Androïd ou Blackberry. Le Conseil National des Barreaux, avec son application « Les avocats », propose de géolocaliser les avocats et de les contacter directement depuis cette application. A signaler également l'initiative de l'agence de communication En3mots qui a conçu une application iPad qui présente les textes de plusieurs codes : code civil, code pénal, code de procédure civile, code de la propriété intellectuelle...

 

Les podcasts d'Archimag
Êtes-vous prêts à renoncer à des services numériques ou à vos appareils électroniques pour le bien commun ? Face à l'urgence climatique, notre rapport au progrès et à la technologie est souvent remis en question. Archimag Podcast a rencontré Alexandre Monnin, philosophe, directeur du master Sciences, Stratégie et Design pour l’Anthropocène à l’ESC Clermont Business School et auteur de l'ouvrage "Politiser le renoncement", aux Éditions Divergences. Il est aussi co-initiateur du courant de la redirection écologique, dont il nous explique le principe.