"Réseau social" ne rime plus forcément avec transparence et partage public. Prenant le contre-pied de l'ADN intrinsèque des médias sociaux, des plateformes d'un genre nouveau se font peu à peu une place sur la toile : porte-drapeaux du "secret", de la "rumeur" et du "chuchotement", elles ont pour point commun de protéger l'anonymat de leurs membres.
L'e-reputation est devenue un bien précieux pouvant s'autodétruire en quelques clics. L'application sociale Yik Yak l'a bien compris : elle "permet aux gens de partir d'une page blanche" en supprimant "les idées préconçues sur eux". Née à l'université d'Auburn (Alabama), aux Etats-Unis, elle s'est répandue comme une traînée de poudre en ne rendant visibles les messages publiés sur sa plateforme que dans un rayon de huit kilomètres et sans jamais dévoiler l'identité de ses auteurs.
Conversations dans le noir
Les applications Secret et Whisper (chuchotement), qui fonctionnent sur le même principe de publications anonymes, surfent sur cette vague de la protection de la vie privée : elles auraient respectivement levé 8.6 millions et 21 millions de dollars de financement. Whisper revendique, en deux ans d'existence, plus de 2,5 milliards de pages vues sur son service.
Enfin, Rumr (rumeur) permet des discussions privées entre amis, telles d'intimes "conversations dans le noir". Cette nouvelle application de messagerie en temps réel offrant, selon sa porte-parole Liva Biseniece, la possibilité de "communiquer sans craindre les jugements sur ses opinions et croyances" aurait, selon le groupe letton Ask.fm, été téléchargée par 35 millions de personnes dans une dizaine de pays.
Repères de corbeaux numériques
Toutefois, ces illusions d'intimité sont dangereuses. Les fausses rumeurs, les blagues, les alertes à la bombe, voire même des intimidations ou dénonciations de camarades ont rapidement fleuri sur Yik Yak. S'apparentant même à un véritable harcèlement en ligne. Comme le prédit l'investisseur Austin Hill à l'AFP, "on verra ces entreprises et leurs utilisateurs, qui se croyaient anonymes, traînés devant les tribunaux".
Le bon, la brute et le truand
Evoquant la "sauvagerie" pouvant se déchaîner anonymement en ligne, la pédiatre Natasha Burgert craint que celle-ci ne débouche sur des suicides. "Dans les cas les plus tragiques, taper quelques touches sur un clavier peut tuer, explique-t-elle à l'AFP. Car selon elle, les adolescent ne comprennent pas "les conséquences et les répercussions à long terme". Certains spécialistes voient donc ces nouveaux réseaux sociaux comme le terreau de vilaines blagues pouvant rapidement mal tourner. Ce type d'applications reflètent en effet l'éventail des comportement humains classiques vis à vis d'autrui : les bons, les mauvais et même les très laids.
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