Sommaire du dossier :
- E-santé : thérapie par la dématérialisation
- A quoi sert le département d'information médicale (Dim) d'un hôpital ?
- A l’hôpital Saint-Joseph de Marseille, la dématérialisation se porte bien
- Le CHU de Toulouse dématérialise les pratiques des soignants
Déployer une plateforme de dossier patient informatisé (DPI) n’est pas une fin en soi. Encore faut-il qu’elle soit adoptée par le personnel médical et soignant. Pour ce faire, le CHU de Toulouse a mandaté une équipe pour inciter son personnel à abandonner le papier et migrer vers des pratiques dématérialisées.
Au CHU de Toulouse, c’est grâce à l’action conjointe des directions des équipements, de l’hôtellerie et de la logistique (EHL) et de la direction des systèmes d’information et de l’organisation (DSIO) qu’a été mis en place le projet « Tendre vers le zéro papier en consultations ». Basée à la fois sur la réorganisation des pratiques de la gestion des archives papier et le déploiement d’un module de numérisation, cette démarche permet d’intégrer les pièces médicales papier dans le dossier patient informatisé (DPI) déjà existant.
Ce dispositif de dématérialisation des dossiers de consultation, lancé le 1er janvier 2015, rencontre dans la majorité des cas l’adhésion des équipes médicales et soignantes. C’est en tout cas le sentiment d’Alain Rosello, qui mène ce projet en lien avec Éric Aygalenq, en charge du volet informatique : « Je coordonne ce projet sous couvert du directeur EHL et en lien avec la DSIO, explique-t-il ; c’est ce qui fait notre force, car jusqu’ici, ces deux structures travaillaient de façon isolée et non concertée ».
Le papier : un support indispensable ?
La réorganisation du service central des archives papier et le projet de mise en place d’un dossier patient informatisé ont été développés de façon simultanée en 2008. Si le DPI fut déployé sur l’ensemble du CHU de Toulouse deux ans plus tard, la mise à disposition de l’outil informatique n’avait alors que très peu modifié les pratiques de la gestion papier : la volumétrie et les mouvements de dossiers papier ne diminuaient pas pour autant. Bien au contraire. Ce constat établi par le CHU a donc soulevé nombre de questions : quelles en sont les raisons ? Pourquoi le DPI n’est-il pas réellement utilisé ? Pour quelle raison le papier demeure-t-il un support indispensable ?
La base du projet « Tendre vers le zéro papier en consultations » a donc reposé dans un premier temps sur une analyse des pratiques. « Le rejet de l’outil informatique n’était pas en cause, estime Alain Rosello, mais plutôt certaines habitudes, difficiles à changer : les services utilisaient le logiciel, mais continuaient à produire des dossiers patient papier de façon systématique, pour des raisons de traçabilité, juste au cas où ».
De l’audit au déploiement
Mandaté il y a un an pour mener le dispositif de dématérialisation des dossiers médicaux lors des consultations, Alain Rosello se fixe alors trois objectifs :
que les services aient de moins en moins recours au dossier papier par une refonte des pratiques de gestion, que chaque dossier patient informatisé soit mis à jour, avec un maximum de documents nécessaires à la prise en charge médicale, et enfin que le CHU connaisse une diminution dans les mouvements de dossiers papier réduisant les coûts tout en améliorant la logistique et l’ergonomie de travail des secrétariats.
La mise en place du dispositif des dossiers de consultation se déroule ensuite sur différentes phases. Une fois obtenu l’accord de chaque chef de service, Alain Rosello réalise un audit sur les pratiques utilisées dans la gestion des dossiers papier en concertation avec les encadrements. « Je commence d’abord par consulter les acteurs sur la gestion du dossier papier, explique-t-il ; j’organise ensuite un suivi des mouvements de dossiers et les corrige avec les services afin de tendre uniquement vers des mouvements réellement nécessaires. Si les mouvements de dossiers persistent, j’essaye de comprendre avec eux la raison d’un tel volume avant de leur exposer ensuite, lors d’une deuxième réunion, les avantages qu’ils auraient à adopter le DPI ».
Un recensement des équipements nécessaires pour la numérisation est ensuite réalisé. Il est également demandé aux médecins de dresser la liste des typologies de documents à numériser au quotidien afin de faciliter la recherche sur le DPI. Il peut s’agir, par exemple, de comptes-rendus de radios, de comptes-rendus de laboratoire, mais aussi de lettres de praticiens ou d’autres documents très spécialisés. Alain Rosello passe ensuite la main à son collègue Éric Aygalenq, en charge du déploiement de l’application, de son paramétrage et de la formation.
À ce jour, le module de numérisation des pièces détachées a été adopté par environ un tiers de l’établissement. « Dans les services où le DPI a été bien déployé, on peut noter une réduction de 40 à 50 % des mouvements de dossiers papier », précise Alain Rosello. Si ce dernier a tout de même observé que près d’un médecin sur trois refuse encore d’utiliser le DPI, il note que ce n’est plus à lui de solliciter les services : « Ce sont les médecins qui me contactent, s’enthousiasme-t-il ; et les plus jeunes adoptent le dispositif immédiatement ».
"Un projet qui ne coûte pas grand-chose"
Alain Rosello estime qu’un an lui sera encore nécessaire pour mener à bien sa mission, qu’il juge profitable à tous et économiquement satisfaisante. Le logiciel d’intégration pourrait même évoluer dans un second temps, en fonction des nouveaux besoins formulés par les médecins : « Certains d’entre eux demandent à ce qu’on puisse intégrer dans le DPI des photos et des vidéos (de lésions, par exemple) prises avec leur smartphone, explique Alain Rosello ; cela fait partie de projets à venir, mais ce n’est pas une priorité. Pour le moment, notre objectif est de déployer au maximum ce dispositif et de tendre vers zéro l’utilisation du dossier papier. Voyons déjà si cela fonctionne et se concrétise ».