L’Etat Français souhaite, en effet, généraliser en 2026 l'utilisation de la facturation électronique pour les paiements inter-entreprises. Une mesure qui viserait à mieux lutter contre la fraude à la TVA. Depuis 2017, les entreprises qui travaillent avec l’Etat sont déjà contraintes de dématérialiser leurs factures et de passer par le portail Chorus Pro pour les transmettre. Ce déploiement progressif est entré l’an dernier dans sa phase finale en faisant de la facture électronique une obligation pour les TPE traitant avec l’Etat. La prochaine étape réside dans l’utilisation de la facture électronique pour les paiements entre les entreprises, aussi bien en émission qu’en réception.
Facture électronique en B2B : une obligation progressive
L’article 222 de la loi Macron du 6 août 2015 comptait rendre obligatoire l’acceptation de la facture électronique dans les relations inter-entreprises. Mais cette disposition avait été considérée comme contraire à l’article 232 de la Directive TVA, qui prévoit qu’une facture électronique peut être émise “sous réserve de l’acceptation du destinataire”. L’Etat a cependant décidé d’aller plus loin et d’imposer la facture électronique aux transactions B2B d’ici 2026.
Et ce, grâce à l’article 56 du Projet de Loi de Finances 2020 qui instaure cette obligation de manière progressive entre le 1er juillet 2024 et le 1er janvier 2026, en tenant compte de la taille et du secteur d’activité des entreprises concernées. À partir de 2024 donc, toutes les entreprises seront obligées d’accepter la réception de factures électroniques et les grandes entreprises seront obligées d'y avoir recours pour l'émission de leurs propres factures. C’est ce qu’explique un rapport publié de la Direction générale des finances publiques (DGFiP).
Facture électronique : tout le monde y gagne !
Pour les entreprises (comme pour l’administration fiscale), le passage à la facturation électronique est une opération bénéfique sur plusieurs points :
- primo, elle renforce la compétitivité des entreprises en réduisant la charge administrative liée à la gestion des factures. Le coût d'une facture électronique est estimé à moins d'un euro, contre un peu plus de 10 euros pour une facture papier.
- secundo, elle sécurise les relations commerciales grâce à un suivi plus précis de l'avancée du traitement des factures. Ce qui contribue aussi à limiter les litiges liés aux délais de paiement.
- tertio, elle permet de mieux lutter contre la fraude à la TVA grâce à des recoupements automatisés entre achats et ventes et à une obligation de reporting. Les entreprises devront, en effet, transmettre les données concernant leurs transactions avec des particuliers (de manière anonymisée) et avec des acteurs étrangers.
- quarto, elle facilite les déclarations de TVA grâce au pré-remplissage.
- quinto, elle garantit le pilotage plus précis des actions gouvernementales en matière de contrôle et de politique économique et fiscale.
Facturation électronique : sur quel modèle ?
D'un point de vue opérationnel, le rapport préconise de faire cohabiter les opérateurs privés de facturation existants et une plateforme publique, qui pourrait aussi proposer gratuitement aux petites entreprises des services de facturation. Cette dernière assurerait également la collecte des données de facturation. Des deux schémas techniques présentés, le rapport privilégie clairement le modèle en « Y », qui offre davantage de souplesse, notamment pour les entreprises qui ont déjà mis en place des flux de facturation électronique (notamment en EDI) via des plateformes privées.
Ce qui limite les coûts d’adaptation et d’entrée dans cette réforme.
Quel est l’impact de la crise sanitaire sur les habitudes de facturation des entreprises ?
Le Forum National de la Facture électronique (FNFE) a réalisé l’an dernier une enquête afin de mesurer les impacts de la première vague de la Covid-19 sur les entreprises françaises et sur l’usage de la facture électronique. Celle-ci montre notamment que les factures PDF se déploient de manière significative dans toutes les entreprises, mais qu’environ 30% des entreprises utilisent fréquemment le scan de factures et qu’excepté les grandes entreprises, les factures papier sont encore dominantes en réception.
Cette enquête révèle également que plus l’entreprise est grande, plus elle a des difficultés dans le traitement des factures fournisseurs au format papier. D’où l’intérêt de passer rapidement à la facture électronique ! D’autant que d’une manière générale, cette enquête de la FNFE confirme une réelle prise de conscience des apports de la facture électronique par tous les types d’entreprises, après avoir vécu un premier confinement surprise et, à plus forte raison, depuis la mise en place du télétravail.
Une obligation limitée
Le rapport souligne également que cette obligation de facturation électronique ne peut s’étendre à l’ensemble des transactions opérées par une entreprise, notamment en raison de l’absence d’une harmonisation des règles applicables à la facturation électronique au niveau européen et mondial, mais aussi par l’absence d’obligation, sauf exceptions, d’émission de factures dans le cadre de relations B2C.
Facture électronique : des questions encore en suspens
Pour lutter contre la fraude à la TVA, cette obligation de facturation électronique doit aussi s’accompagner d’une obligation de transmission de données (« e-Reporting ») afin d’obtenir davantage d’informations nécessaires à l’identification du traitement TVA appliqué. Notez que les assujettis étrangers non établis en France ne seraient pas soumis à ce dispositif et que des aménagements sont attendus pour certains secteurs d’activités, comme le secteur bancaire, le BTP ou encore les micro-entreprises.
Chorus Pro, comme plateforme centrale
C’est via la plateforme Chorus Pro que transiteraient les données de facturation inter entreprises en vue de leur transmission au SI de la DGFiP. Sauf que l’utilisation de Chorus Pro exige certaines adaptations, à la fois en termes d’ergonomie, de fonctionnalités, mais aussi de capacités à supporter de gros volumes d’échange et de modalités d’interfaçage. Voilà pourquoi la mise en œuvre de cette obligation de facturation électronique sera progressive avec, dès 2023, une obligation de réception de la facture électronique pour l’ensemble des entreprises. Puis une obligation d’émission progressive, en fonction de la taille des entreprises :
- 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises,
- 1er janvier 2025 pour les ETI,
- 1er janvier 2026 pour les PME et TPE.
Le gouvernement lancera l'an prochain une concertation avec les professionnels pour définir les textes réglementaires nécessaires à l'application de cette réforme.
Avec la crise sanitaire et ses phases de confinement, les entreprises ont compris qu’il était urgent de digitaliser la gestion et le traitement de certains flux documentaires essentiels à leur fonctionnement. Si les flux RH (contrats, avenants, bulletins de paie, etc.) font partie de ceux-ci, les flux de facturation sont la priorité. Continuer à facturer ses clients et régler les échéances de ses fournisseurs sont les clés d’une trésorerie maîtrisée. Mais avec le confinement et la généralisation du télétravail, de nombreuses entreprises se sont avérées incapables d’assurer la réception, le traitement et la validation des factures reçues au format papier. Une gestion qui s’avère pourtant fondamentale dans la relation que noue une entreprise avec ses clients et ses fournisseurs, et dans son fonctionnement économique. Autant de raisons qui font de la facture électronique un impératif.
Pour aller plus loin
DocuWare, éditeur de solutions GED et Workflow, spécialiste de la dématérialisation des factures clients et fournisseurs, édite un livre blanc “Passer à la facture électronique”, pour tout comprendre sur les processus de factures dématérialisées. A télécharger gratuitement sur : https://start.docuware.com/fr/info/passer-a-la-facture-electronique