Laure Lahaye, comédienne à Beyrouth, bibliothécaire à Paris

  • Portrait de Laure Lahaye, reponsable des collections au département littérature et art de la Bibliohtèque nationale de France (BnF).

    Lorsqu’elle parle, son accent si caractéristique des francophones d’Orient fait merveille ! On croirait entendre l’un de ces artistes ou intellectuels du Levant qui ont pratiqué avec passion la langue française.

    Née à Beyrouth, Laure Lahaye a grandi à Tripoli (Liban). Aujourd’hui en charge des collections au département littérature et art au sein de la Bibliothèque nationale de France, elle se souvient de ses premières années passées dans une famille laïque :

    « Mes parents m’ont appris à résister aux pressions religieuses d’où qu’elles viennent. Dans les années 70, être laïc au Liban ne posait pas de problème particulier. Ma mère dirigeait une association féministe et enseignait le français à l’école publique. Elle m’a permis de grandir dans un milieu ouvert et francophone ».

    Son adolescence est marquée par une rencontre avec le célèbre metteur en scène Roger Assaf (récompensé par un Lion d’or à la Biennale de théâtre de Venise en 2008). Laure Lahaye passe le concours d’entrée à l’école des beaux-arts de Beyrouth ; elle est reçue. Commence alors une vie de comédienne qui lui fait jouer un théâtre très ancré dans la vie politique et sociale libanaise. Le succès est au rendez-vous :

    « Alors que les bombardements s’abattaient sur Beyrouth, les gens continuaient de sortir et venaient nombreux au théâtre ! »

    Parallèlement, elle entame une deuxième vie : journaliste culturelle pour des revues et des radios libanaises. Mais la guerre qui accable le « pays du cèdre » devient insupportable et provoque le départ de nombreux intellectuels. Menacée en raison de ses activités de journaliste, elle doit quitter Beyrouth (« une ville que j’aimais beaucoup ») pour Paris.

    L’école BNF

    En France, son premier travail la mène à Radio-Orient qui était alors très écoutée par la diaspora libanaise de Paris. Mais c’est en 1990 que sa vie bascule et lui fait découvrir le monde professionnel des bibliothèques. À la faveur d’un examen portant sur la littérature et la langue arabes, elle intègre la Bibliothèque nationale de France et plus particulièrement ce que l’on appelait alors le département des entrées étrangères.

    « J’ai été formée au catalogage sur le site historique de Richelieu. Je n’ai pas fait d’école de bibliothéconomie, mais la BNF a été pour moi une école où j’ai appris toutes les facettes du métier ».

    Aujourd’hui, son emploi du temps lui fait en effet exercer de nombreuses tâches : valorisation des collections, écriture de bibliographies et d’articles, conseil au public, formation de stagiaires, animation du club des livres de la BNF...

    « Ces différentes activités me plaisent beaucoup, car elles me permettent d’avoir un aperçu de toute la variété du métier de bibliothécaire. Elles m’incitent aussi à me tenir au courant de l’actualité éditoriale dans des domaines qui m’intéressent. J’ai le sentiment de transmettre quelque chose d’important aux lecteurs, aux étudiants et aux gens qui visitent la bibliothèque ».

    Paris, une ville éprise de liberté

    Quand elle quitte le premier étage de la tour n° 4 de la BNF, Laure Lahaye se consacre à une autre activité : conseillère de quartier de Bercy. Cette portion du XIIe arrondissement n’a plus de secret pour elle, car elle y vit et elle y travaille. De réunions en visites sur le terrain, elle saisit l’histoire de Paris à tous les coins de rue :

    « Une ville que j’aime profondément, pleine de culture et éprise de liberté ». 

    Et quand il lui reste du temps, elle le consacre au Collectif des Libanais laïcs de France. Cette association propose des cours de français aux étrangers sans distinction d’origine. Le sort des migrants syriens vient lui rappeler la situation très inquiétante du patrimoine culturel du Levant :

    « Je crains de voir l’héritage culturel libanais subir le même sort tragique que celui de Syrie ou d’Irak. Les saccages des bibliothèques de la région sont une véritable tragédie. Et je trouve merveilleux que la Bibliothèque nationale de France entretienne des échanges avec les bibliothèques du monde arabe ».


    Elle like :

    • Son livre préféré : Dérives sur le Nil (Naguib Mahfouz)
    • Sa ville préférée : Paris
    • Sa musique préférée : les frères Rahbani
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