Saisi par un chercheur qui souhaitait l'ouverture des archives de François Mitterrand relatives au génocide perpétré au Rwanda en 1994, le Conseil constitutionnel estime qu'il existe "des limitations justifiées par l'intérêt général".
Dominique Bertinotti, la mandataire de François Mitterrand, est-elle en droit de refuser l'accès aux archives de l'ancien président de la République ? Pour le Conseil constitutionnel, la réponse est positive. Saisi par le chercheur François Graner qui souhaitait accéder aux archives de François Mitterrand relatives au génocide perpétré au Rwanda en 1994, le Conseil constitutionnel a estimé que la mandataire est en droit de s'opposer à l'accès à ces archives.
Dans une décision rendue aujourd'hui, le Conseil rappelle un principe : la reconnaissance du droit d'accès aux documents d'archives publiques. "Il est, toutefois, loisible au législateur d'apporter à ce droit des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général".
Protection particulière des archives
Par ailleurs, "le Conseil constitutionnel relève que, par les dispositions contestées, le législateur a conféré au signataire du protocole de versement ou à son mandataire le pouvoir d'autoriser la consultation anticipée des archives publiques émanant du Président de la République, du Premier ministre et des autres membres du Gouvernement, de manière à accorder une protection particulière à ces archives, qui peuvent comporter des informations susceptibles de relever du secret des délibérations du pouvoir exécutif et, ainsi, à favoriser la conservation et le versement de ces documents. Ce faisant, le législateur a poursuivi un objectif d'intérêt général".
L'institution de la rue Montpensier souligne par ailleurs que cette restriction est limitée dans le temps. A ses yeux, "les dispositions contestées ne portent pas d'atteinte à l'exercice de la liberté d'expression et de communication garantie par l'article 11 de la Déclaration de 1789"
Près 10 000 pages
Selon François Graner, ces archives présidentielles relatives au génocide du Rwanda représentent "à peu près 10 000 pages". Le chercheur a pu dans un premier temps accéder à un certain nombre d'archives militaires, notamment de la DGSE, conformément à une promesse de François Hollande en 2015. "François Hollande a fait lever les obstacles liés au secret-défense [mais] il reste un deuxième verrou : c’est que les archives présidentielles ont aussi leur propre verrou. Et les archives de François Mitterrand ne sont pas consultables pendant 50 ans, sauf dérogation demandée".
Pour M. Graner, la décision du Conseil constitutionnel représente "évidemment une déception de voir la plus haute institution de notre pays consacrer cette spécificité française, le pouvoir arbitraire d’une personne privée d’ouvrir ou non les archives d’autorités publiques. Les motivations de cette décision sont politiques, elles consacrent l’opacité des gouvernants face aux droits des citoyens".
M. Graner a annoncé son intention de porter l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Commentaires (1)