L’Imprimerie Nationale mise sur la confiance en sa dématérialisation

Une carte chronotachygraphe produite par l’Imprimerie Nationale IN

 

Société anonyme, l’Imprimerie Nationale propose des prestations de dématérialisation et de confiance. Elle vient de s’équiper d’une plateforme d’archivage électronique. De quoi lui permettre de proposer à ses clients de nouveaux services.

Le chronotachygraphe équipe les véhicule de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes ou de voyageurs de plus de 9 places. C’est un équipement électronique qui se présente sous forme d’un boîtier comprenant deux lecteurs de cartes, un sélecteur d’entrée manuelle, un écran d’affichage et d’une imprimante. Chaque conducteur est personnellement détenteur d’une carte de chronotachygraphe. Elle répertorie ses activités (conduite, repos), l’identité du véhicule, la distance parcourue…

C’est l’Imprimerie Nationale qui, en 2002, remporte un appel d’offres pour les cartes à puce liées au chronotachygraphe. Elle crée d’ailleurs son activité de confiances à cette occasion. Le dispositif qu’elle propose comprend l’envoi d’un formulaire ou un formulaire en ligne, la réception de justificatifs, le traitement (validation de la conformité) et l’émission des cartes.

"Lorsque l’on voit un dispositif de ce type, on comprend bien l’extrême importance de l’archivage électronique", déclare Emmanuel Michaud, directeur de la branche service et confiance du Groupe Imprimerie Nationale. En 2010, une réflexion est lancée sur l’archivage électronique. L’appel d’offres suit, en 2011, avec une demande concernant un système très structuré apte à faire face à d’importants volumes. Le coffre-fort électronique figure aussi parmi les revendications.

plateforme unique

Arcsys Software voit sa proposition retenue. C’est une jeune et modeste société – créée en 2009, 6 collaborateurs –, mais elle appartient au groupe Infotel, SSII de 1 600 personnes. Sa solution Arcsys d’archivage et de dématérialisation a déjà séduit Axa, EDF, Bouygues Télécom… Dominique Lhopital, directeur général d’Arcsys Software, insiste sur la valeur probante qu’elle préserve, sa pérennité et sa présentation sous forme de plateforme unique vers laquelle convergent tous les flux.

Ce dernier point était particulièrement attendu par Emmanuel Michaud qui souhaitait une approche sur l’ensemble du processus : site internet, numérisation et traitement, chaque événement ou opération étant traduit en données de traçabilité.

Les exigences techniques du projet ne se trouvent pas enfermées strictement dans des contraintes budgétaires. On reste dans des coûts d’investissement – non communiqués – inférieurs à un million d’euros. Surtout, avec la plateforme Arcsys, l’Imprimerie Nationale vise une position concurrentielle sur le marché de la dématérialisation, permettant d’envisager « d’ici quelques années » une volumétrie de l’ordre de 100 To !

agrément Siaf

Deux événements récents renforcent la confiance d’Emmanuel Michaud. D’une part, il vient de remporter un marché lancé par le ministère de l’Intérieur, concernant des dossiers administratifs et avec un volume de 12 millions de pages par an. D’autre part, le 1er juin dernier, le ministère de la Culture et de la Communication a émis un arrêté agréant le Groupe Imprimerie Nationale pour la conservation d'archives publiques courantes et intermédiaires, sur support numérique et sur support papier (agrément Siaf, service interministériel des Archives de France).

Un système d’archivage électronique en ligne suppose un haut niveau de sécurité physique (1). Les locaux informatiques dont dispose la branche services de confiance se trouvent au site industriel de l’Imprimerie Nationale, à Douai (Nord). Un back up est effectué dans deux autres lieux français. De plus, le site de Douai est classé OIV (opérateur d'importance vitale) depuis 2010, ce qui lui permet de bénéficier de dispositions de sécurité prioritaires. Parallèlement, l’Imprimerie Nationale a mis en place des plans de continuité et de reprise d’activité.

embauche d’une archiviste

Le montage fonctionnel mise en place par Arcsys Software compte plusieurs niveaux. Le premier est bien sûr la plateforme Arcsys assurant la gestion du stockage. Le second, la couche client, est fourni par un partenaire éditeur de logiciels, Naoned Systèmes. Il apporte avec Mnesys la couche métier archivistique.

Contrairement à ce que laisse supposer le mot coffre-fort électronique, "l’espace sécurisé de confiance" installée pour l’Imprimerie nationale se veut ouvert. Il s’agit de garder des informations que des acteurs viennent déposer ou consulter. Dans l’exemple du transport, l’espace est à la disposition de l’entreprise ou de ses conducteurs ; il est aussi interrogeable par exemple par le service des douanes.

Tout n’est pas qu’affaire de technologie. L’Imprimerie Nationale a embauché une archiviste, "en contrat à durée indéterminée", se plaît à souligner Emmanuel Michaud, et qui partage son temps entre le siège parisien et le site de Douai.

Si la plateforme comporte une gestion des accès, cet impératif trouve aussi sa traduction physique. Tout le personnel est soumis à un contrôle. Des zones de l’entreprise font l’objet d’un accès restreint, ce qui est le cas notamment de certaines parties du site informatique.

L’Imprimerie Nationale entend pouvoir garantir la confidentialité des informations, tout comme la non divulgation des données personnelles. Un membre de son personnel est correspond informatique et libertés (2).

migrer en permanence

La performance de la plateforme doit être au rendez-vous avec, à terme, le traitement de 400 000 nouveaux documents par jour. La branche service et confiance peut aller jusqu’à garantir contractuellement un accès 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. En fait, le délai de reprise d’activité après une défaillance suppose un coût pour le client, mais, précise le directeur général d’Arcsys Software, "selon les cas, on n’a pas toujours besoin d’avoir une reprise dans la seconde".

Qu’en est-il de la pérennité ? « Un système qui sera là dans 99 ans, ça n’existe pas », lance Dominique Lhopital. Il ajoute : "Une baie de stockage, on sait qu’elle dure trois ans". Pour lui, la réponse à apporter tient en la capacité du système à migrer en permanence. Il s’agit de ne pas s’enfermer dans des formats propriétaires, de respecter les standards – des centaines de standards sont en jeu, « impossibles à lister » –, de diversifier les supports, entre le magnétique et l’optique et de se montrer évolutif. Enfin, la réversibilité du système est garantie. C’était pour l’Imprimerie Nationale un élément obligatoire.

La solution a été mise en œuvre en mars 2012. L’heure est maintenant au montage de solutions, dans une approche globale de la valeur probante. C’est par exemple la gestion des fiches de paie, avec "mandat de prélèvement SEPA", pour le compte d’un opérateur téléphonique. Une bonne marge de volumétrie est en réserve pour les clients à venir. Emmanuel Michaud l’affirme : "La plateforme ne tournera jamais à 100 %, nous garderons toujours 50 To d’avance" !

(1) Voir Archimag, juillet-août 2012, n° 256, pp. 31-33, l’article « mise en place d’un système d’archivage électronique ».
(2) Voir Archimag, février 2011, n° 241, pp. 34-35, l’article « droit : le correspondant informatique et libertés ».


+ repères

l’Imprimerie Nationale en bref

L’Imprimerie Nationale se présente comme « une entreprise de haute technologie prestataire de services et de solutions sécurisées ». Intégratrice de solutions globales, elle propose des produits et des services sécurisés à destination de l’Etat et du citoyen, mais aussi des collectivités territoriales et du secteur privé.
Les trois axes de son activité sont :
- l’authentification des personnes et des biens : passeport biométrique, carte d’identité…
- les services de confiance : solutions de traitement physique et numérique des documents sécurisés
- l’impression et les flux numérisés.
Ancienne direction centrale du ministère du Budget, l’Imprimerie Nationale est devenue société anonyme en 1993, elle est détenue à 100 % par l’Etat et bénéficie du monopole de la réalisation des titres sécurisés. Le Groupe Imprimerie Nationale compte 700 personnes. Il se compose des filiales Imprimerie Nationale Continu et Services (INCS), pour ses activités concurrentielles, ChronoServices (gestion informatisée de la délivrance et de la gestion du cycle de vie des titres) et JPrint (impression et façonnage).
www.imprimerienationale.fr

Les podcasts d'Archimag
Rencontre avec Stéphane Roder, le fondateur du cabinet AI Builders, spécialisé dans le conseil en intelligence artificielle. Également professeur à l’Essec, il est aussi l’auteur de l’ouvrage "Guide pratique de l’intelligence artificielle dans l’entreprise" (Éditions Eyrolles). Pour lui, "l’intelligence artificielle apparaît comme une révolution pour l’industrie au même titre que l’a été l’électricité après la vapeur".