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Cet article est issu du dossier "Que doit-on réellement numériser ?" du numéro d'avril d'Archimag. Voici le sommaire du dossier :
- Numérisation des documents : que doit-on réellement numériser ?
- Dématérialisation : tout savoir sur la convention de numérisation
- La RATP crée un atelier de numérisation à force probante pour détruire du papier
- Numérisation : Seris dématérialise ses dossiers RH en haute sécurité
- Comment la MDPH numérise et archive ses dossiers dans le respect des données de santé
Si l’on prend le contexte réglementaire porteur de la dématérialisation des activités métier de nos organisations, secteur public ou secteur privé, domaines RH, financier, comptable, commercial ou autres, on se retrouve assez vite plongé dans la lecture de la norme Z42-26 « Définition et spécifications des prestations de numérisation fidèle de documents sur support papier et contrôle de ces prestations ».
Cette norme est dorénavant le cadre technique applicable dès lors que l’on organise, soit en interne, soit en externe auprès d’un prestataire spécialisé, soit sous forme de lots ou sous forme de flux réguliers, la dématérialisation des dossiers et documents de son organisation. Elle met en évidence la nécessité d’établir une convention de numérisation. C’est le document central autour duquel tout s’articule.
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Définition juridique de la convention :
- Une convention est un pacte, un accord de volonté conclu entre deux ou plusieurs parties et qui s’apparente à un contrat. Une convention est aussi une clause, une condition particulière contenue dans un contrat, un pacte ou un traité.
- Dans le langage juridique, « convention » est synonyme de contrat et d’accord.
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Extrait du « Dictionnaire juridique »
« Les mots “contrat” et “convention” sont utilisés indifféremment. En fait “contrat” désigne plutôt le document et “convention” désigne plutôt le contenu du contrat, c’est à dire, ce à quoi les signataires se sont engagés. Dans ce sens l’article 1108 du Code civil énonce les conditions essentielles pour la validité d’une convention. La formation d’un contrat est subordonnée à la connaissance de l’acceptation de l’offre par le pollicitant, c’est-à-dire au moment de la réception par le celui qui émet une offre de conclure un contrat, de l’acceptation de l’autre. (3e Civ. — 16 juin 2011, pourvoi n° 09-72679, BICC n° 751 du 15 novembre 2011 et Légifrance). » (source : Dictionnaire-juridique.com)
L’article 1101 du Code civil définit d’ailleurs le contrat comme une convention.
Cas d’usage de la convention de numérisation
Le plus souvent une entreprise ou une collectivité qui organise cette démarche est confrontée à plusieurs situations :
- des stocks de dossiers actifs contenant des natures documentaires diverses, avec un classement pas toujours homogène, mais utilisés quotidiennement en terme de ressources par des équipes ;
- des flux entrants ou circulants en interne, réguliers ou pas, centralisés ou pas, et avec vocation à intégrer ces mêmes dossiers ;
- un souhait de dématérialisation uniquement en fonction d’un besoin d’accès à un fonds documentaire jusque-là conservé papier.
On peut donc être confronté à ces six cas d’usage (voir tableau) :
Cas d'usage | Libellé | Points d'attention | Niveau critique |
Cas 1 | Stock actif de dossiers | Beaucoup de métiers ou de domaines dans une organisation ont encore ce type de stock, parfois doublé insuffisamment de dossiers électroniques partiels. | Élevé car dossiers pouvant contenir des documents engageants. |
Cas 2 | Flux entrants | Il s’agit le plus souvent de flux réguliers, type courrier, entrant par voie postale, internalisée ou externalisée directement vers un prestataire. | Élevé car le plus souvent la gestion est faite en 2 temps (donc complexe) et les originaux sont conservés sur un temps moyen (entre 1 et 3 ans) ou avec application des DUA*. |
Cas 3 | Flux internes | Il s’agit des documents circulant en interne, essentiellement en format numérique. | Moyen car ce flux est de plus en plus maîtrisé par les métiers d’autant plus si l’organisation s’équipe de parapheurs et de signatures électroniques. |
Cas 4 | Flux centralisés | Il s’agit d’une chaîne de traitement mise en place de manière centralisée permettant de capitaliser sur un process et un outillage très encadré. | Limité car mise en conformité possible à la norme pour la chaîne de capture et les actions menées et permettre ensuite la destruction des documents papier. |
Cas 5 | Flux décentralisés | Il s’agit d’une chaîne de traitement délocalisée au plus près des utilisateurs permettant ainsi de numériser à la volée certains documents et de les rendre immédiatement : ex. le guichet d’un laboratoire médical, le guichet d’une banque... | Élevé car difficulté à maîtriser les pratiques et le suivi des travaux et de l’usage de l’outillage dans ce cadre ; le réserver à des cas sans besoin de copie fiable. |
Cas 6 | Stock à la demande | Il s’agit d’une chaîne de traitement sollicitée dans des cas d’usage encadrés par un contrat ou un mode opératoire spécifique, pour la dématérialisation d’un fonds ou de plusieurs fonds documentaires (dossiers, documents...) dont l’accès et le partage sont nécessaires au suivi des activités d’une organisation. | Limité car le plus souvent traité dans le cadre d’un atelier de dématérialisation, interne ou externe, aligné sur les recommandations de la norme. |
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Une ou plusieurs conventions ?
Alors faut-il une convention de numérisation spécifique par cas d’usage ou peut-on concevoir une seule convention de numérisation (« CdN » pour les initiés) encadrant plusieurs situations ?
Selon le mode opératoire que l’organisation va mettre en œuvre, on peut se retrouver face à la rédaction de différentes conventions. Car une convention de numérisation est un document engageant qui fait office de document « contractuel » entre le donneur d’ordre et l’opérateur, et définit l’objet de la prestation de numérisation.
Cette convention encadre le processus global, détaille les différentes tâches pour les documents concernés, définit les modalités de la dématérialisation en amont, pendant et en aval du traitement (type de document, ordre de traitement, intercalaire, traitement d’image, couleur ou N/B, métadonnées, etc.), elle identifie les responsabilités notamment du donneur d’ordre (DO), propriétaire des documents, et de l’opérateur (OP) qui numérise (service interne ou prestataire extérieur) et les obligations des deux parties.
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Plusieurs situations
Il y a souvent plusieurs situations. Dans le cas où le donneur d’ordres et l’opérateur font partie de la même organisation, la convention de numérisation devient une procédure interne et reste impérative, elle s’applique pour tous les cas identifiés : stock, flux, centralisé, décentralisé…
Autre cas, pour une société qui passe ou a passé un contrat de prestation de services pour encadrer sa relation avec une société externe qui va gérer des ressources documentaires, il s’agit alors d’établir et d’annexer autant de conventions de numérisation qu’il y aura de cas à traiter (voir tableau).
On doit aussi établir une convention spécifique si on traite des fonds documentaires de natures différentes : photos, plans, documents patrimoniaux, etc. Au final, une organisation peut se retrouver à établir X conventions de numérisation selon les chantiers à réaliser.
Des prestataires de bon conseil
Les prestataires de services du domaine sont des professionnels de bon conseil qui peuvent aussi vous proposer des cadres de travail sur lesquels, comme pour tout contrat, vous pourrez réagir, compléter, amender. Ceci avant de signer la version conforme aux travaux attendus et leur contexte de réalisation.
N’oubliez pas aussi qu’ils sont souvent certifiés pour leurs prestations, et le volet contractualisation de ces mêmes prestations fait partie de ce qui est auditable pour vérifier la conformité à la norme et recevoir la certification qualité. Ils y sont très attentifs.
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Les points clés d"une convention de numérisation
On établit donc autant de conventions qu’il y a de situations à traiter, il n’y a pas de limite.
Certaines organisations, pour des opérations qui se font en interne, peuvent mettre en place une convention de numérisation-cadre (sur le modèle d’un contrat-cadre) et définir des procédures différentes selon les cas d’usage et les situations (sur le modèle d’avenant).
Quel que soit le contexte, le cadre et le type de cas d’usage, toutes les conventions doivent clarifier systématiquement les points suivants :
- les donneurs d’ordre ;
- le périmètre du fonds documentaire à traiter ;
- le mode opératoire décrivant chacune des étapes (de la prise en charge des documents à numériser et le contrôle de réception, jusqu’à la conservation dans un système d’archivage électronique en cas de copie fidèle) ; toutes ces caractéristiques précises y compris l’outillage sont à consigner dans la CdN ;
- les responsabilités ;
- les délais ;
- les référentiels de contrôle et la démarche de contrôle qualité ;
- les résultats garantis (empreintes, cachets serveurs…) ;
- les modalités de livraison et les devenirs du papier d’origine et des fichiers de travail produits dans le cadre de la numérisation (purge au-delà d’un certain délai…).
Les limites possibles restent celles de la faisabilité de travaux de numérisation : tout n’est pas numérisable, pour des raisons d’état sanitaire des documents notamment, des niveaux plus ou moins dégradés du support, de l’encre, des couleurs, etc. On est là sur des limites techniques et sur des profils d’outillage particuliers.
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Contrôle qualité et seuils d’acceptabilité
Si bonne démarche il y a, on ne peut que vous conseiller d’établir le cadre général avec plan type, objectif attendu (copie simple, fiable, fidèle), niveau de responsabilité, réversibilité, purge, contrôle qualité… Bref, posez tous les sujets nécessaires et ajustez en fonction des fonds documentaires concernés. Un chapitre de la CdN est également à dédier aux opérations de contrôle qualité sur les travaux attendus, intégrant même des seuils d’acceptabilité sur la qualité de l’image, l’indexation, les métadonnées. Enfin, dans le cas des organisations du secteur public, ministères, collectivités, établissements publics, nous vous rappelons que les CdN relèvent aussi du périmètre du contrôle scientifique et technique des Archives de France (Notamment, vous pouvez vous pouvez vous référer à la « Charte qualité pour la numérisation fidèle de documents », publiée par le Service interministériel des Archives de France, version 1, 2018.) notamment dans le cas de destruction de documents papier. C’est pourquoi, en cas d’établissement de convention de numérisation fidèle, il est impératif de leur soumettre et de vérifier avec elles la bonne conformité du processus et de l’outillage utilisé.
Caroline Buscal
Manager Serda Conseil